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20 juin 2025 17:51
L’auteur, acteur de la société civile, pousse à une prise de conscience suite au crash du vol Air India 171 qui transportait des passagers d'Ahmedabad, en Inde, vers Londres, au Royaume-Uni.
Difficile de comptabiliser le nombre de vols que j’ai faits au cours de ma carrière de navigant chez Air Mauritius, Toutefois, j’estime avoir vécu 30 600 heures entre ciel et terre, exposé aux accidents aériens comme celui qui a coûté la vie à 241 des 242 personnes à bord du courrier d’Air India à destination de Londres le 12 juin dernier. Épargné d’une telle tragédie, j’ai tout de même vécu quelques moments inquiétants, pour dire le moins, durant mes voyages. Ces incidents auraient pu empirer et se révéler dramatiques s’ils n’avaient pas été efficacement gérés par les équipages et autres parties concernées.
Dans un avion, rien n’est laissé au hasard. Tout obéit à une procédure établie qui est régulièrement évaluée et mise a jour. Tout est scrupuleusement contrôlé, vérifié et revérifié avant de passer à l’action, bien que, certaines prises de décisions demandent un réflexe immédiat ; une prise d’initiative à laquelle les membres d’équipages sont formés de manière continue.
Néanmoins, malgré toutes ces structures et mesures, l’imprévu meurtrier arrive à se concrétiser mais à des fréquences, fort heureusement, éloignées. Statistiquement, sur un plan planétaire, le risque pour un voyageur de périr dans un accident d’avion est de 1 sur 13,7 millions. Par contre, les perspectives de mourir dans un imprévu de la circulation sont de 1 sur 93 !
Les raisons de cette grande disparité sont multiples et ces quelques lignes n’ont pas la prétention de les déployer. Toutefois, il n’est pas exclu de cogiter autour de cette disproportion bien que le caractère sacré de la vie aspire à ce que les voyages soient épargnés de tragédie aussi minimes en soient les probabilités.
C’est, entre autres, pour cela que lorsqu’ils se concrétisent les rares accidents d’avion provoquent un émoi spectaculaire, d’autant plus que, même rare, un seul accident arrache un nombre impressionnant de vies.
En ce qui concerne l’accident de la circulation, le nombre de victimes est, en général, restreint à l’exception des imprévus tragiques impliquant le train ou l’autobus et, là encore, nous sommes loin du lourd bilan d’un accident aérien impliquant un gros porteur commercial plus ou moins rempli. Toutefois, la fréquence de ces accidents est bien plus élevée.
Quoi qu’il en soit, ces comparaisons ne seraient qu’une envolée de données indigestes et déplacées si elles échouent à provoquer une prise de conscience autour de la manière dont nous nous protégeons mutuellement lors de nos déplacements, qu’ils soient dans les airs, sur terre ou en mer. Aussi, des trajets sûrs impliquent une maintenance scrupuleuse de nos véhicules, la vérification avant chaque utilisation, une excellente communication avec ceux qui partagent la route que nous empruntons, une vigilance sans faille et une formation appropriée à la conduite.
L’erreur étant humaine, son éradication complète relève de l’utopie. Toutefois, à l’image des voyages par avion, elle peut être si contrôlée que les perspectives de concrétisation sont considérablement réduites. Néanmoins, quand l’erreur se matérialise, malgré tout, les infrastructures devraient être la dernière ligne de défense pour prévenir blessés graves et pertes de vies.
C’est peut-être une ironie, mais la tragédie qui s’est jouée à Ahmedabad est contradictoirement une occasion d’attirer l’attention sur la sécurité entourant le transport aérien comparé à la circulation terrestre. En effet, une application des mesures et des mentalités entourant le voyage par avion pourrait considérablement contribuer à sécuriser nos routes. Elle mettrait, ainsi, en déroute ce carnage qui arrache 3 700 vies sur nos routes chaque jour, sans tambours ni trompettes…
PAR ALAIN JEANNOT
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