Publicité

Cedric Sunassee

Moi, TikTok, le Kreol Morisien et mon engagement pour l’environnement

29 septembre 2025

«Avec le temps, mes vidéos sont aussi devenues un moyen de dénoncer certaines réalités, toujours avec une touche d’humour», nous confie Cedric Sunassee.

«Mon parcours n’a pas été facile. Au début, j’étais ce qu’on appelle un slow learner. J’avais l’impression que l’éducation n’était pas faite pour moi, et il m’a fallu énormément de persévérance pour avancer...» Que ce soit sur TikTok ou au sein de l’ONG Sov Lanatir, le jeune homme engagé pour l’environnement est aussi un amoureux du Kreol Morisien. Récemment, il a vécu une belle expérience au Kenya. Il nous présente son petit monde...

Beaucoup le connaissent pour son «Touzour Fi...» sur TikTok. Ces deux mots qui parsèment ses petites vidéos s’accompagnent toujours de petites histoires et autres anecdotes qui ne manquent pas de retenir l’attention et d’amuser sa petite communauté qui adore l’entendre et le voir raconter ces situations cocasses qui peuvent parler à tout le monde. En effet, «C’est Dric», ou plutôt Cedric Sunassee, est un visage et une personnalité que beaucoup suivent déjà.

Mais le jeune homme a aussi plusieurs autres cordes à son arc. Amoureux de la nature, celui qui porte la casquette de chef des départements de la Flore et d’Art au sein de l’ONG Sov Lanatir, et qui est aussi membre exécutif de l’organisme qu’il a rejoint depuis 2022, vient de vivre une expérience très enrichissante après avoir participé à The Global Center on Adaptation Youth Academy and Pan-African Youth Adaptation Forum, du 30 août au 5 septembre, à Nairobi au Kenya, particulièrement à la Kenya School of Government. Mais avant d’en apprendre plus sur sa belle aventure, on lui demande d’abord de se présenter. Qui est donc celui derrière la page «C’est Dric» ?

«Je suis Cedric Sunassee, j’ai 23 ans et je viens d’un milieu rural : site Barkly, kot tou dimounn konn tou dimounn, un peu comme dans un grand village. J’ai récemment obtenu mon diplôme en Agricultural Science and Technology à l’Université de Maurice et je travaille aujourd’hui dans le domaine du turf management, avec un accent particulier sur la durabilité. En parallèle, je suis aussi créateur de contenu sur TikTok, où je mêle humour, morale et dénonciation des injustices, tout en partageant aussi des vidéos pour aider les autres. Mais au-delà de tout cela, je reste avant tout un jeune Mauricien passionné par la nature, que je considère comme une véritable mère, une entité vivante qui nous nourrit et nous relie les uns aux autres», nous confie le jeune homme.

Le décor maintenant planté, il nous invite à le suivre dans son petit monde. «Mon parcours n’a pas été facile. Au début, j’étais ce qu’on appelle un slow learner. J’avais l’impression que l’éducation n’était pas faite pour moi, et il m’a fallu énormément de persévérance pour avancer. Sans le soutien constant de mes parents et de mes professeurs, bann nam pasione, je n’y serais sans doute pas arrivé. Un vrai tournant est venu avec la découverte de l’agriculture au Collège de la Confiance, où j’ai bénéficié d’un encadrement qui m’a permis de progresser pas à pas. Puis, au Collège du Saint-Esprit, en participant aux débats intercollèges diocésains, je suis tombé amoureux du Kreol Morisien, une langue qui porte l’identité de notre pays. L’université a été pour moi un autre tremplin. Elle m’a fait comprendre que Maurice a encore beaucoup à offrir, même à l’ère de la crise du changement climatique. La nature n’attend rien en retour, pourtant, elle continue de nourrir et d’inspirer. Nous avons la possibilité de tisser des liens avec elle pour nous enrichir matériellement : manger, boire..., mais surtout spirituellement, philosophiquement, scientifiquement et culturellement», poursuit Cedric.

Ses jeunes années ont beaucoup contribué à faire de lui l’homme qu’il est aujourd’hui. «Comme président de l’Eco School Committee au Collège du Saint-Esprit, j’ai appris à identifier les moteurs de changement et à reconnaître clairement les défis environnementaux, qu’il s’agisse de la pollution ou du climat. J’ai aussi appris à évaluer si un projet était faisable et crédible, en utilisant des matrices d’évaluation. À tout cela s’ajoutent les valeurs du scoutisme qui m’accompagnent toujours : "Scout, toujours prêt." Toutes ces expériences et ces valeurs m’ont donné confiance et m’ont ouvert les portes de nouveaux engagements, notamment avec Sov Lanatir, où je poursuis cette volonté de relier savoir, identité et environnement.»

Mère Nature

Son engagement pour la nature est un élément important de son équilibre : «Mon engagement provient de mon moi intérieur, un instinct présent depuis toujours, sans doute parce que nous tenons notre existence d’elle. J’ai également la main verte – un héritage transmis de mon arrière-grand-mère à mon père, puis à moi. Centenaire aujourd’hui, elle parle encore aux plantes et, comme elle le dit si bien, quand une plante rapporte ses fleurs et ses fruits, "linn fer so ti devwar". Cet amour pour la nature que je porte s’aligne parfaitement avec la philosophie de Sov Lanatir : il commence par soi, puis se transmet à l’autre, et finalement à Mère Nature. C’est une connexion qui va de l’humain à l’humain, et de l’humain à la nature.»

Ayant représenté Maurice au Kenya pour la Youth Academy et aussi pour la Pan-African Youth Adaptation Forum, il a vécu une belle aventure qu’il n’est pas près d’oublier : «C’est à la fois une responsabilité et un honneur : représenter Maurice, mais aussi toute une génération qui refuse de rester spectatrice, une jeunesse qui bouillonne de rêves et d’audace. Mon rôle a été de porter nos réalités locales dans une conversation continentale et mondiale. Tout ceci en présence du GCA Youth Advisory Panel, qui réunissait des représentants des Philippines, du Brésil et des Pays-Bas. Laba, nou ti kouma dan enn gran vilaz, chacun habitué à aider l’autre et à partager ce qu’il a, so ti konesans. Cet esprit m’accompagne, pour ramener la connaissance acquise lors de la Youth Academy : transmettre cette expertise sur le leadership et l’adaptation climatique comme un outil. Un outil qui permettra à de nombreux jeunes de contribuer davantage à l’adaptation, et à ceux qui agissent déjà sur le terrain de se sentir rassurés et confirmés que leurs actions s’alignent avec une vision globale.»

«Une richesse immense»

Là-bas, il s’est nourri de tout ce qui s’est présenté à lui : «Représenter mon pays au Kenya a été une expérience marquante. J’ai été plongé dans un véritable mouvement panafricain, entouré de jeunes venus de plus de 50 pays d’Afrique différents. J’ai découvert une diversité incroyable de cultures, de langues et de perspectives, chacun apportant ses propres solutions aux défis climatiques. Au-delà des échanges, j’ai acquis de précieuses connaissances en leadership et en adaptation climatique. Cette expérience m’a montré comment transformer des idées en initiatives concrètes, et surtout, elle m’a donné une vision claire de ce que la jeunesse africaine peut accomplir quand elle s’unit. L’Afrique est l’un des continents les plus jeunes au monde, avec près de 65 % de sa population âgée de moins de 25 ans. Cette jeunesse n’est pas seulement le leader de demain, mais elle agit déjà au présent, en contribuant à des solutions concrètes aux défis climatiques.»

Qu’en est-il pour notre île ? «À Maurice, cela se traduit notamment par la mise en œuvre des Contributions Déterminées au niveau National (CDN), nos engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris. Mais ces objectifs n’ont de sens que si les jeunes sont portés par les communautés : les personnes issues de différentes communautés, les ONG, pêcheurs, habitants des zones côtières. Leur savoir-faire local, combiné aux connaissances modernes, garantit que les actions sont adaptées et durables. Car nous portons déjà une richesse immense : biodiversité, langues, cultures et savoirs traditionnels. La jeunesse et les communautés ne sont pas des figurants, mais le cœur battant de l’adaptation climatique», nous répond Cedric, aujourd’hui riche de tout ce qu’il a appris au Kenya.

Il n'a bien évidemment que des mots doux pour Sov Lanatir et pour le travail que fait la petite équipe très motivée : «J’ai découvert Sov Lanatir sur les réseaux, au moment du Wakashio, en voyant des jeunes comme moi se mobiliser face à ce désastre écologique. Mwa mo ti dan lakaz, pa pe kapav ede plis ki sa, me trouv bann kamarad pe fer tousala, fer ou anvi partisipe ansam. Ce qui m’a ensuite attiré encore plus, c’est que Sov Lanatir soit écrit en Kreol Morisien, une langue que je porte aussi bien sur le bout de la langue, à la pointe de la plume, que directement au cœur. Comme notre pays, qui porte en lui tant de cultures et d’histoires, Sov Lanatir représente pour moi un petit fragment de cette identité mauricienne. En l’intégrant, j’ai découvert que la loupe interdisciplinaire n’est pas une utopie mais une réalité vivante, et surtout, j’ai trouvé des personnes avec qui je me sens réellement connecté. Ce cheminement n’est pas un moment figé, mais un événement continu, une expérience en constante évolution.»

En parlant d’évolution, impossible de ne pas aborder avec lui son rôle de créateur de contenu : «Tout a commencé en 2021, alors que j’étais encore étudiant. C’est venu naturellement, en m’inspirant de l’environnement qui m’entourait : les gens, leurs petites mimiques, zot ti palab, même les accents. Je m’inspire de la vie de tous les jours, mais aussi de petites fictions, et j’ai vite réalisé que je pouvais faire sourire les gens et parfois les faire rire, ce qui finissait par créer un vrai moment de bonheur. Avec le temps, mes vidéos sont aussi devenues un moyen de dénoncer certaines réalités, toujours avec une touche d’humour. Le plus beau reste quand on m’arrête dans la rue pour me lancer un "Touzour fi !", ma phrase fétiche devenue un clin d’œil entre moi et ceux qui me soutiennent. Mon inspiration vient de ces instants simples : une discussion entre amis, une situation drôle, une conversation ordinaire… car ce sont les petites choses qui rendent la vie extraordinaire. "Lazwa li dan twa".»

Pour en apprendre plus sur lui, pour ceux qui sont curieux, rendez-vous sur sa page TikTok pour découvrir l'une des facettes de «C’est Dric».

Publicité