Le père Henri Souchon
Prenant la parole lors d’une rencontre de plusieurs organisations catholiques, mardi dernier, le père Souchon a demandé aux parents des enfants créoles de ne pas laisser leurs enfants prendre une langue orientale comme matière à l’école.
Lors de son intervention qui a été très applaudie, le père Souchon “a demandé aux enfants créoles de refuser de faire une langue orientale” . Il a ajouté: “il y a certains qui ont plus de chances que d’autres, certains ont six chances alors que d’autres n’en ont que 5. Il n’y a pas d’égalité. c’est un crime de faire un enfant de 5 ans apprendre trois langues étrangères en même temps”. Le père Henri Souchon a aussi dit que : selon sa propre analyse, il estime que lors des recensements en 1990 et en 2000 sur un langage “usually spoken at home,” en 2000, au total 791 000 Mauriciens, affirmaient, leur préférence pour le créole contre 652 000 en 1990. Étaient aussi présents plusieurs représentants des organisations catholiques, notamment Jean Pierre Maurice (président de la Plate-forme pour l’unité des créoles), Denis Grandport (président de la Fédération des Associations de parents d’élèves des collèges catholiques), Clifford Maniacara (président de la PTA des écoles primaires catholiques) ainsi qu’André Lee, Norbert Benoît (pédagogue), ce jour, là au Foyer de L’Amitié à Rose-Hill.
Pour faire circuler l’information, les organisations vont se rendre dans plusieurs endroits de l’île pour mener campagne contre l’inclusion des langues orientales dans le programme scolaire du primaire. Les intervenants à ce rassemblement ont fait part à l’assistance que 43% des enfants ne suivent pas les cours en langues orientales et ils ont précisé que “ces enfants sont de toutes les communautés”. D’un autre côté, le président de la FAPEC (primaire), Clifford Maniacara a déclaré: “on dit se battre pour qu’il n’y ait plus de discrimination”. Il aimerait savoir quelle institution qui prépare les papiers d’examens des langues orientales et a fait savoir qu’il a déjà envoyé une correspondance à cet effet au ministre de l’Éducation et qu’il attend toujours une réponse. Il a proposé l’enseignement de langues étrangères, notamment l’allemand, l’espagnol et le portugais, ou sinon “d’introduire la langue créole dans le programme scolaire du primaire ou un autre sujet: la ‘Creative Education” en option pour les autres élèves qui ne veulent pas apprendre une langue orientale. Ce fut ensuite au tour d’André Lee de la FAPEC de prendre la parole. “Pa tous nou l’Egliz, pa tous nu religion et pas tous nu l’évek”, a-t-il dit faisant allusion aux événements de cette semaine. Quant à Denis Grandport, président de la FAPEC (secondaire) il a déclaré: “qu’il faut que la langue créole soit introduite dans le programme scolaire du primaire au lieu d’une langue orientale.”. Parlant de l’affaire des Rs 11, 5 m qui oppose l’Église à Suttyhudeo Tengur, il a déclaré: “qu’on n’a pas peur de lui. On se pose la question: où monsieur Tengur trouve-t-il de l’argent pour aller aussi souvent devant le Privy Council. Il faut qu’une commission d’enquête soit instituée pour savoir d’où il puise cet argent”. A aussi pris la parole lors de la rencontre de mardi soir, le pédagogue Norbert Benoît, qui a dit qu’il n’y a pas que des créoles parmi les 43% d’enfants qui ne pratiquent pas une langue orientale qui” éna beaucoup tamoules qui pa cause tamoul cot zot et chinois ki pa cause mandarin cot zot”.Les organisations catholiques tiendront une autre rencontre le 20 février à Cassis.
Le jugement écrit disponible Le jugement écrit, tant attendu par les autorités catholiques et le gouvernement, vient confirmer le jugement oral du Privy Council du mercredi 17 décembre dernier et celui de la Cour suprême de Maurice en novembre 2002, donnant gain de cause à Suttyhudeo Tengur dans sa lutte contre les 50% des places réservées dans les collèges catholiques et le recrutement sur une base religieuse. Les Law Lords sont clairs: “L’Eglise, récipiendaire des fonds publics, ne peut recruter sur une base religieuse, selon la Constitution”. Réactions Madan Dulloo, (L’auteur du rapport sur les langues orientales en 1993): Jean-Yves Violette, président du Front commun pour la justice au CPE en 1995 Veerendra Ramdhurn, président de la Hindu House :
Nous avons cherché à savoir pour qui vont voter aux législatives de 2005,les responsables du mouvement contre la comptabilisation des points en langues orientales aux examens du CPE. Vont-ils voter contre l’alliance MSM/MMM par exemple?Ci-dessous, les réactions de Clifford Maniacara, Norbert Benoît, Denis Grandport et André Lee:
André Lee(membre de la Fédération des Associations des Parents des Écoles Catholiques-FAPEC): “Je ne peux actuellement me prononcer”
Norbert Benoît(membre de l’Unesco): “C’est un peu trop tôt pour donner une réponse à cette question”
Denis Grandport de la FAPEC (secondaire): “Je vais voter pour le gouvernement s’il oeuvre dans l’intérêt de la population”.
Clifford Maniacara(de la FAPEC-primaire): “Pour ma part, rien n’est encore sûr. Je ne sais pas si je vais voter pour ou contre ce gouvernement.”
L’Église, récipiendaire des fonds publics, ne peut recruter sur une base religieuse
Dans ce document, les Law Lords du Privy Council expliquent les raisons ayant motivé leur rejet, le 17 décembre dernier, de l’appel du diocèse de Port-Louis contre le jugement prononcé le 13 novembre 2002 par la Cour suprême. Selon eux, la Constitution de Maurice “est claire”. Pour sa défense, l’Église catholique avait évoqué les clauses 3 et 14 de la Constitution. La clause 3 parle de “Fundamental Rights and Freedom of the Individuals” alors que la clause 14 a trait à la “Protection of freedom to establish school”. Ainsi, les Law Lords font ressortir que la clause 14 stipule “qu’un groupe de particuliers peut fonder et gérer des écoles selon ses propres critères,” mais ils soulignent que la même section dit encore ceci : “Un groupe peut gérer ses propres écoles selon ses propres critères mais à condition qu’il le fasse à ses propres frais”(ce qui n’est pas le cas des collèges catholiques qui reçoivent des subventions de l’État). Donc, cette clause est limitée et s’applique uniquement aux écoles qui sont fondées et maintenues sans avoir besoin des fonds publics. C’est pour cela que les Law Lords ont estimé que le recours aux clauses 3 et 14 par les autorités catholiques n’était pas valide.
Pour sa part, le syndicaliste Suttyhudeo Tengur avait mentionné la clause 16 de la Constitution. Selon les Law Lords, cette clause fait état de “protection from discrimination” ; ils considèrent, donc, qu’il y a eu “discrimination” car “l’argent public a été utilisé pour maintenir le système de recrutement sur des critères religieux” (l’argument même du syndicaliste pour sa lutte). D’ailleurs, le jugement écrit détermine que la plainte de Suttyhudeo Tengur n’est pas dirigée contre l’Église mais contre l’État. Dans ce cas, le fait que l’Église reçoit des subventions des fonds de l’État et recrute sur une base religieuse, constitue, selon les Law Lords, une “discrimination illégale”. Ces derniers observent qu’aucune demande n’a été faite par les représentants des autorités catholiques pour un ajournement des débats afin qu’ils puissent apporter d’autres témoignages et que, concernant les frais, c’est l’Église qui doit régler les dépenses encourues par Suttyhudeo Tengur pour soutenir son appel devant le Conseil privé de la Reine.
Suttyhudeo Tengur:
“Le recrutement sur le critère social débouchera sur beaucoup d’abus”
Commentant les événements de cette semaine, le discours “choquant de l’évêque”, l’arrivée du jugement écrit et les contestations sur la comptabilisation des points en langues orientales aux examens du CPE, Suttyhudeo Tengur nous a fait la déclaration suivante:
“La sortie de l’évêque contre l’État ne me surprend pas. C’est la méthode, selon moi, qu’a choisie l’Église catholique lorsqu’elle veut obtenir quelque chose. L’Église a finalement provoqué la conférence de presse de Bérenger qui a dû céder sous la pression. Tout ce tapage ne m’a pas surpris”. Commentant la proposition de l’État de considérer “le critère social” à la place du critère religieux, il nous a dit : “Ce procédé débouchera sur beaucoup d’abus. Sur quoi l’Église pourra-t-elle se baser pour définir ce critère social ? Je me pose la question !”
“L’introduction des langues orientales dans le programme scolaire du primaire est inévitable”
“Le rapport sur les langues orientales que j’avais fait en 1993 proposait que les langues orientales soient comptabilisées pour la certification aux examens du CPE. Ce Select Committee a vu le jour suite aux engagements pris par le MMM/MSM en 1991. Ces recommandations n’ont jamais été approuvées suite à diverses contestations, comme c’est le cas actuellement”. Parlant de la situation actuelle il nous a déclaré que “l’introduction des langues orientales dans le programme scolaire du primaire est inévitable. C’est une logique même”. Il a aussi ajouté que “cette affaire prend une allure trop communale”.
“C’est faux de dire que nous avions perdu devant le Privy Council”
Jean-Yves Violette, le président de l’Union pour le progrès, nous a fait part, en parlant de son combat de 1995 contre la comptabilisation des points en langues orientales aux examens du CPE en 1995 devant le Conseil privé de la Reine, qu’il soutient la lutte “pour la justice et l’égalité des chances aux examens du CPE”. Il a ajouté : “C’est le même combat qu’on avait mené, le mouvement et moi en 1995. C’était inévitable que l’affaire refît surface”, dit-il. Se rappelant de son combat qui l’avait mené devant le Conseil privé de la Reine, il nous a déclaré : “C’est faux de dire que nous avions perdu devant le Privy Council, le jugement a simplement dit que cette affaire a été prise devant un mauvais “forum” (la Cour suprême)” et que la plainte devait prendre la forme d’une ‘Judicial Review’.
“Il faut à tout prix que le jugement soit respecté”
Interrogé sur les contestations sur la comptabilisation des points en langues orientales aux examens du CPE, Veerendra Ramdhurn nous a fait la déclaration suivante : “Il faut à tout prix que le jugement du Privy Council soit respecté. Maurice étant un pays de droit, il faut faire ce que dit la loi”.