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Par Elodie Dalloo
14 décembre 2025 19:03
Un autre grave incident a été répertorié à la prison de Melrose. Cette fois, celui-ci a conduit au décès d’un détenu – Andy Selmour, 33 ans et originaire de Roche-Bois. Ce mardi 9 décembre, après les heures de visite, il aurait été agressé par ses codétenus au Kestrel yard de l’établissement et a rendu l’âme au bout de quelques heures. La scène, d’une violence extrême, a été filmée par les caméras CCTV. Bouleversée, sa concubine Levinskey Drapcand réclame justice. Elle se confie.
Pendant des années, il a collectionné les frasques. Les vols, les agressions et la drogue étaient devenus son quotidien au point où ses mauvaises habitudes avaient poussé bon nombre de ses proches à prendre leurs distances de lui. Au moment où il a rencontré sa compagne Levinsky Drapcand, il y a cinq ans, la vie d’Andy Selmour, âgé de 33 ans et originaire de Roche-Bois, n’avait aucun sens ; il touchait le fond. Mais il voulait changer pour elle, pour donner une chance à leur relation. «Il m’a montré une partie de lui qu’il ne montrait pas aux autres ; je voyais en lui quelqu’un de bien, contrairement à ce que bon nombre de personnes pouvaient dire. J’ai toujours cru en lui ; je voulais l’aider à changer de vie, à devenir quelqu’un de meilleur. Je voyais tous les efforts dont il faisait preuve », lâche la jeune femme. Mais Rome ne s’est pas faite en un jour. En février, cette année, le trentenaire a été condamné à purger une peine de prison pour larceny being armed with offensive weapon. C’est en août 2027 qu’il allait retrouver la liberté.
Le cœur brisé, la jeune femme est, malgré tout, restée à ses côtés et a continué à faire preuve de résilience face à l’adversité. Leur histoire d’amour n’était plus faite de diners aux chandelles, de week-ends improvisés, mais d’une lutte acharnée contre la distance la plus cruelle qui soit : celle imposée par des barreaux. Lors de leur dernière conversation au parloir de la prison de Melrose, ce mardi 9 décembre, Andy Selmour semblait déterminé : «Il m’a dit qu’il en avait fini des démêlés avec la justice, qu’il voulait m’épouser dès qu’il serait libéré, qu’il trouverait du travail, qu’il souhaitait qu’on fonde une famille et renouer avec ses deux filles. Il disait qu’il était grand temps qu’il change de vie et me semblait vraiment sincère.» Hélas, cet espoir est probablement la dernière chose qu’il a ressenti puisque quelques heures plus tard, il a trouvé la mort dans des circonstances qui restent à déterminer au Kestrel Yard de l’établissement. A ce stade, les enquêteurs privilégient la piste d’un règlement de comptes entre codétenus, comme tendent à le démontrer les images des caméras CCTV ayant filmé la scène. Le trentenaire aurait été tabassé avec un morceau de bois provenant d’un carrom board, forcé à ingurgiter une substance, avant d’être abandonné à son sort, recouvert d’atroces blessures. Il aurait reçu les premiers soins à l’infirmerie de la prison avant d’être autorisé à rejoindre son bloc, où il est décédé quelque temps plus tard.
C’est aux alentours de 23 heures, ce soir-là, que la triste nouvelle a été annoncée à Levinsky Drapcand. Avec le départ brusque et tragique de son compagnon, elle a vu s’envoler tous ses projets d’avenir. «Il m’a été arraché au moment même où nous parlions mariage et famille. Ziska ler mo pa pe le krwar ki li nepli la. So lavey nou pe koz nou lavenir, so landime mo pe bizin idantifie so lekor ek rann li omaz», déclare la jeune femme, émue aux larmes. Elle relate que sa dernière visite au parloir, quelques heures seulement avant le décès de son compagnon, a été particulièrement riche en émotion. Elle savait que célébrer les fêtes de fin d’année derrière les barreaux, loin de ceux qui lui sont chers, aurait été particulièrement dur pour Andy Selmour. Elle avait donc voulu lui faire une surprise. «J’avais emmené ses deux filles avec moi, ainsi que son petit-fils, qui est né après son incarcération. C’était la première qu’il le voyait. Il avait attendu ce moment pendant tellement de temps.» Hélas, leur première rencontre aura été la dernière.
Autopsie reportée
Notre interlocutrice dit avoir appris que son compagnon «a été agressé par plusieurs détenus à cause d’une histoire de vol. Se so bann kamarad mem ki finn batt li. Kan bann offisie finn intervenir, li ti deza bien blese». Submergée de questions, elle s’interroge surtout sur les soins qui lui ont été prodigués «Pourquoi a-t-il été autorisé à quitter l’infirmerie ? Le médecin de garde n’a-t-il pas vu qu’il était dans un état préoccupant ? Pourquoi n’a-t-il pas été conduit à l’hôpital ?» Selon elle, ce serait «kan linn retourn dan blok ki so lizie inn vir blan. Linn koumans saign par so zorey, so nene ek so labous. Mo finn tann dir ki avan li mor, linn kriye mo nom plizier fwa». Accompagnée des sœurs de la victime, elle a participé à l’identification du corps du trentenaire le lendemain de la tragédie ; une épreuve qui a été particulièrement douloureuse pour elle. «Li ti mekonesab. Li ti ena blesir partou, linn mor avek so lizie ouver. Li ti ena mark lor so lebra, se bann kou ki linn resevwar kan linn rod defann li. Cela a été tellement dur pour moi de le voir dans cet état que j’ai perdu connaissance», lâche la jeune femme, anéantie.
L’autopsie a, en revanche, dû être reportée parce que la mère d’Andy Selmour, à l’étranger au moment du drame, a tenu à être présente pour l’exercice. Ce n’est que le vendredi 12 décembre, après son retour dans l’île, que cet examen a pu avoir lieu. Celui-ci, pratiqué par le Dr Sudesh Kumar Gungadin, chef du département médicolégal de la police, a attribué son décès à une fracture of skull with intracranial haemorrhage. Sollicitée, Anne-Lise, la sœur du trentenaire, avance que «tout s’est passé comme nous l’espérions, mais nous devons désormais nous concerter pour la marche à suivre. Nous voulons que justice lui soit rendue. Nous avons déjà retenu les services d’un homme de loi et déciderons de la prochaine étape après la cérémonie mortuaire». Levinsky Drapcand abonde dans le même sens : «Sel zafer ki mo demande se ki bann responsab peye. Li ti kapav ena so bann defo, me li pa ti meritt enn lamor parey. Mo espere ki li gagn so lazistis.» Elle espère également que la possibilité lui sera donnée de visionner les images des caméras de surveillance afin de mieux comprendre comment une telle tragédie a pu survenir. Les funérailles du jeune homme ont eu lieu à 15 heures ce samedi 13 décembre, à Roche-Bois.
Enquête en cours
Dans une déclaration faite à la presse, le Commissaire des Prisons, Dev Jokhoo, a avancé que «lorsque des officiers ont conduit Andy Selmour au Medical Unit ce jour-là, il a dit qu’il s’était fait mal en tombant dans la salle de bain. Finn donn li tretman, finn fer pansman, apre finn fer li ale. Zis apre, linn fer enn reket avek prison administrator pou dir ki li pas santi li an sekirite dan Kestrel Yard. Il a été conduit dans un autre bloc et c’est là-bas qu’il a commencé à se sentir mal. Il a été conduit à nouveau au Medical Unit, où il a été admis, avant de rendre l’âme». Il n’a pas souhaité se prononcer davantage sur l’enquête en cours mais le responsable de communication de l’administration pénitentiaire a assuré que «les prisonniers, aussi bien que les officiers, collaborent pleinement avec la police». Une enquête interne a également été initiée. Après cet incident dramatique, deux haut-gradés de la prison – un surintendant des prisons et un assistant surintendant des prisons –, en service au moment des faits, ont été suspendus, tandis que plusieurs détenus ont été transférés vers d’autres établissements à titre préventif. La charge provisoire de meurtre ne sera logée contre les suspects que lorsque l’enquête préliminaire aura pris fin et que la police aura identifié tous ceux ayant participé à cette agression mortelle.
Par ailleurs, en intervenant sur la mort troublante d’Andy Selmour à l’Assemblée nationale, le Pemier Ministre a qualifié les faits de révoltants, rappelant que des incidents graves avaient déjà eu lieu à la prison de Melrose en juillet dernier. Il a donc annoncé la mise sur pied d’une commission d’enquête pour faire la lumière sur ce drame. Celle-ci sera présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen.
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