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Mort suspecte d’un Français à Maurice

Sa famille et les autorités françaises réclament la vérité sur cette affaire «préoccupante»

21 décembre 2025

Les proches de ce Français évoquent plusieurs faits troublants autour de son décès.

De nombreuses zones d’ombre persistent autour de la mort d’un Français de 47 ans à Tamarin quatre mois après les faits. Deux enquêtes sont en cours simultanément, à Maurice et en France. La famille du défunt, terrassée par le chagrin et révoltée, réclame la vérité alors que les autorités françaises exigent une coopération judiciaire rapide sur un dossier jugé grave et inquiétant.

Depuis août dernier, la région de Tamarin, surtout la communauté française qui y réside, est secouée par une troublante affaire. Dans la nuit du 24 au 25 août, un ressortissant français de 47 ans a été retrouvé sans vie à son domicile de Morcellement Black Rock, à Tamarin. C’est le majordome de la résidence, un employé de longue date, qui a fait la macabre découverte et a alerté les forces de l’ordre. À leur arrivée, les policiers ont découvert le Français gisant au sol, en sous-vêtements. Une porte coulissante donnant sur l’arrière de la maison était ouverte, sans signe apparent d’effraction. Les lieux ont ensuite été placés sous scellés et sous surveillance. Le Français vivait à Maurice depuis près de neuf ans. Il était un professionnel reconnu dans le domaine du recyclage du plastique et héritier d’une entreprise familiale prospère fondée par son père. La famille possède également plusieurs biens à Maurice.

L’autopsie a conclu à un œdème pulmonaire et cérébral. Toutefois, le rapport final ainsi que les résultats des tests toxicologiques n’ont toujours pas été soumis, donc, on ne sait pas encore ce qui a entraîné cet état. De nombreux bleus ont, par ailleurs, été constatés sur le corps du défunt ; des blessures qui intriguent profondément son entourage ainsi que les enquêteurs, d’autant que des allégations de maltraitance envers lui ont fait surface après le drame.

Deux enquêtes distinctes ont d’ailleurs été ouvertes sur ce décès suspect. À Maurice, le dossier est entre les mains de la Major Crime Investigation Team (MCIT) et en France, un procureur a été désigné pour suivre l’affaire. Les autorités françaises ont officiellement sollicité l’aide du bureau de l’Attorney General afin d’activer une coopération judiciaire autour de ce drame où planent plusieurs zones d’ombre. Selon des sources proches du dossier, la France souhaite une collaboration rapide et totale avec les autorités mauriciennes. La police et la justice françaises affirment vouloir aller jusqu’au bout.

La famille de la victime remue également ciel et terre pour que la vérité soit établie sur cette mort qui, pour elle, n’a rien de naturelle. Car même si l’homme était connu pour sa dépendance à l’alcool, malgré un parcours remarquable comme champion de motocross, et avait entamé plusieurs cures de désintoxication sans succès durable, cela ne peut, selon elle, expliquer les circonstances de sa mort. «Mon frère est décédé dans des circonstances suspectes. La vérité doit être connue. J’ai toute confiance dans les équipes d’enquête mauriciennes et françaises», affirme la sœur de la victime, qui déplore l’attente interminable du rapport final d’autopsie.

Un fait particulièrement grave est aujourd’hui mis en avant par la famille : le meilleur ami du défunt avait adressé un courrier aux autorités mauriciennes et françaises avant le décès de celui-ci. Il y dénonçait des «mauvais traitements», évoquait une «mort imminente» et de «graves menaces» pesant sur la vie de son ami. «Le contenu de ce mail est horrible», confie Me Christophe Cariou-Martin, avocat de la famille. Selon lui, une dizaine de témoins ont déjà été entendus en France dans le cadre de cette affaire. «Ces personnes ont été témoins de violences subies par la victime, en France comme à Maurice», affirme l’avocat. Les proches de la victime ainsi que les enquêteurs se demandent ainsi si son épouse, une Française également, aurait joué un rôle dans toute cette affaire. Car la veille de sa mort, le défunt aurait également envoyé un message audio à sa belle-sœur dans lequel il qualifierait son épouse de «veuve noire».

Autre élément jugé troublant : l’épouse aurait quitté Maurice pour Dubaï deux ou trois jours avant la découverte du corps. «C’était la première fois qu’elle voyageait seule», souligne l’entourage du couple. À son retour à Maurice, la veuve a été entendue par la police qui n’a pas trouvé d’éléments contre elle, à ce moment-là, pouvant justifier son arrestation. Il est également rapporté qu’elle aurait souhaité faire incinérer la dépouille, une démarche à laquelle les autorités françaises se sont opposées, compte tenu des graves allégations déjà formulées.

La sœur et la belle-sœur du Français décédé – cette dernière est mariée au frère de l'épouse du défunt – ont, elles aussi, été entendues par la MCIT. Son beau-frère – le frère de l’épouse du défunt – se dit également prêt à venir à Maurice pour aider les enquêteurs. La belle-soeur en question lance un appel clair : «Mon époux et moi voulons coopérer avec la police pour dénoncer des faits de violence conjugale qu’il a subis. Je vous précise que mon mari est le frère de la femme du défunt. Il faut que justice soit rendue. Je suis révoltée, et ses confidences la veille de son décès concernant cette maltraitance conjugale ne font qu’accroître ce besoin de justice.» Pour Me Christophe Cariou-Martin, cette affaire dépasse le cadre d'un simple fait divers. «J’ai vu beaucoup d’affaires criminelles dans ma carrière, mais celle-ci est particulièrement préoccupante. Une expatriation qui tourne à l’isolement et au drame», affirme-t-il.

Me Christophe Cariou-Martin et le représentant légal de la famille à Maurice, Me Dick Ng Sui Wa, insistent sur l’importance d’une coopération judiciaire entre la France et Maurice. Les autorités françaises, à travers le Quai D’Orsay, soit le ministère des Affaires étrangères, ont d’ailleurs déjà demandé une coopération judiciaire lorsque le président Emmanuel Macron était en visite officielle à Maurice. La police mauricienne, par le biais de son service de presse, confirme qu’une enquête est toujours en cours dans cette affaire. À ce jour, plusieurs personnes ont déjà été entendues par les enquêteurs qui attendent, nous dit-on, le rapport de toxicologie ainsi que le rapport final de l’autopsie pour décider de la marche à suivre.

La veuve du principal concerné est, elle, restée injoignable. Une chose est sûre : tant que les zones d’ombre persisteront, cette affaire continuera de hanter les deux pays.

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