• Parité en politique : des voix pour inspirer le changement
  • Milys.créations : quand Emily transforme vos idées en souvenirs inoubliables
  • Il s’était introduit chez une dame âgée en pleine nuit : un voleur maîtrisé par des habitants à Camp-Levieux
  • Saisie de Rs 10 millions de cannabis à Pointe-aux-Sables - Incriminé par son oncle, le policier Brian Beauger nie toute implication
  • Étoile d’Espérance : 26 ans d’engagement, de combat et d’espoir
  • Arrêté après l’agression d’un taximan : Iscoty Cledy Malbrook avoue cinq autres cas de vol
  • Golf : un tournoi caritatif au MGC
  • Le groupe PLL : il était une fois un tube nommé… «Maya L’Abeille»
  • Nilesh Mangrabala, 16 ans, septième victime de l’incendie du kanwar à Arsenal - Un rescapé : «Se enn insidan ki pou toultan grave dan nou leker»
  • Hippisme – Ouverture de la grande piste : les Sewdyal font bonne impression

Lillka Cuttaree : Hommage à mon père

Sa famille, son équilibre.

Quelques mois après le décès de son père, elle lui dédie une fondation, la JKC (Just, Kind & Caring) Foundation, avec l’idée de contribuer au façonnement d’une meilleure île Maurice. Lillka Cuttaree nous dévoile son projet…

Dans sa voix, beaucoup de tendresse. Dans ses yeux, des étincelles mais aussi de l’amour. C’est toujours comme ça quand Lillka Cuttaree parle de son père Jayen Cuttaree, homme publique et personnalité politique décédé le 19 décembre dernier à l’âge de 77 ans. Elle esquisse de grands sourires, marque des moments de silence et pèse chacun de ses mots pour évoquer le souvenir de cet homme qui a contribué à faire d’elle la femme qu’elle est aujourd’hui.

 

Bien qu’il ne soit plus là physiquement, celui qui était, selon elle, un patriote hors pair est plus que jamais présent de par les valeurs et les leçons de vie qu’elle a héritées de lui… Ce qui lui a donné l’idée de créer la JKC Foundation (Just, Kind & Caring Foundation) «autour des notions de justice sociale», en hommage à ce grand homme qui n’a jamais caché son amour pour sa petite île. «C’est un peu un projet personnel. J’ai voulu lancer la fondation le 22 juin, le jour de l’anniversaire de mon père. Il aurait eu 78 ans», confie la directrice de KIP Center for Leadership que nous rencontrons à son bureau à Ebène, à quelques jours du lancement de son grand projet.

 

C’est entourée de sa famille qu’elle monte ce projet en janvier : «Avec mon père, on était très proches au niveau des idées et des visions qu’on avait pour Maurice. Je pense que les dernières années de sa vie ont été souvent marquées par une forme de désillusion par rapport à la contribution personnelle qu’il aurait pu apporter au pays, très certainement aussi liée à son désengagement de la cause politique. Et souvent, dans le contexte local, on voit que finalement, c’est l’accès au pouvoir qui donne un peu de légitimité pour faire un avancement au niveau du pays. On était supposés lancer, notamment, un livre sur le commerce.»

 

Si le temps leur a fait défaut, Lillka se dit aujourd’hui très fière de venir de l’avant avec la JKC Foundation : «C’est une mémoire vivante qui est partie un peu trop tôt. On n’a pas eu le temps de s’asseoir pour formaliser un certain nombre de projets qui nous tenaient à cœur. Au-delà du fait qu’il était mon père, il était aussi quelqu’un qui a influencé des générations, qui a fait la fierté du pays et a pu amener le pays, dans un certain nombre de domaines, à un niveau international. C’est pour moi un privilège d’avoir pu le côtoyer, au-delà du fait qu’il soit mon père. J’ai toujours trouvé qu’il avait un certain nombre de valeurs qui font avancer une nation : autour de l’inclusion, de l’intégrité et de l’excellence. Ce qui transcendait des débats partisans et communautaires un peu futiles. C’était quelqu’un de fondamentalement mauricien. J’ai grandi dans ce genre d’environnement familial et c’est ce qui m’inspire. Il faudrait définitivement transcender certains compartiments pour aller davantage vers des  valeurs fondamentales mais aussi une identité nationale.» 

 

Son dossier en mains c’est avec beaucoup de passion que celle qui a plusieurs cordes à son arc et qui se donne beaucoup pour la cause féminine, souhaite que son projet touche tous les Mauriciens : «Avec la disparition de mon père, j’ai senti une urgence personnelle à faire quelque chose, à contribuer à sa mémoire vivante. On a pris beaucoup de temps pour réfléchir sur la mission de la fondation que je dédie forcément à mon père mais ce n’est pas une fondation sur lui. C’est une instance qui se veut extrêmement futuriste, qui est donc portée vers le futur et basée sur son héritage au niveau des valeurs.»

 

Et comme point de départ, Lillka pense miser sur l’éducation : «C’est le vecteur principal de la fondation mais dans un contexte de justice sociale. C’est-à-dire que c’est fondamentalement un principe moral d’avoir une égalité des droits au niveau de la population. Comment est-ce que la nouvelle génération peut avancer sur le long terme avec beaucoup d’espoir malgré tout ce qu’on entend autour de soi ? L’objectif est qu’on puisse avoir une égalité des chances, qu’on puisse arriver à créer une culture d’égalité des chances. Et je prends mon père comme role model parce que c’est quelqu’un qui venait d’un milieu extrêmement modeste et s’il n’avait pas eu accès à l’éducation, il n’aurait jamais pu être la personne qu’il était devenue.»  

 

Des histoires

 

Toute sa vie, elle s’est nourri des histoires que lui racontait son père, ce «bon vivant» qui «adorait danser» et de qui elle tient son côté fêtard : «Il y a, par exemple, ses petites anecdotes autour de la mobilité sociale. Par exemple, il ne pouvait manger un œuf que pour son anniversaire et il le faisait d’ailleurs en cachette dans sa chambre. Dans son livre, quand il parle de sa scolarité, il raconte qu’il était très touché lorsqu’il voyait des enfants plus défavorisés que lui. Il cachait ainsi à sa mère qu’il partageait son pain avec d’autres qui n’en n’avaient pas parce qu’il sentait qu’ils en avaient plus besoin que lui. C’est cette solidarité collective qu’on a un peu perdu aujourd’hui à Maurice.»

 

L’ambition autour du projet, explique Lillka, est extrêmement modeste : «Je ne suis pas là pour donner des leçons de morale mais j’estime que chaque personne à son niveau peut apporter une petite contribution positive au bien-être de la société et c’est ce qu’on veut faire.» C’est à Rose-Hill que la fondation sera basée : «On va commencer par des ateliers d’art et de coding pour les enfants. On va aussi, avec l’aide du secteur privé, créer une école de coding.» Celle qui milite beaucoup pour l’émancipation de la femme compte aussi mettre à profit son expérience dans le domaine : «Je compte créer un centre d’artisanat pour les femmes de la région de Rose-Hill en partenariat avec Madagascar.

 

Je souhaite aussi que la JKC Foundation devienne un lieu qui va promouvoir le dialogue social et économique. J’espère qu’on pourra créer un forum de standing international où on pourra avoir des leaders qui nous aideront à réfléchir à une vision de société qui dépasse des positions partisanes et pour promouvoir une intelligence collective. Ce sont des actions qui ont leur place dans une société pluriculturelle comme Maurice. On n’est pas là pour revoir le public policy, ce n’est pas mon rôle, on veut juste apporter une certaine réflexion qui peut emmener un changement.

 

C’est une fondation qui va promouvoir l’espoir avec une grande place accordée à l’éducation avec de nouveaux vecteurs. L’art aussi sera au cœur de nos actions. L’éducation, l’entrepreneuriat et l’art sont de beaux vecteurs pour essayer de  créer une identité nationale. Je vais ainsi m’associer avec l’Afrique du Sud pour certains projets où on va s’intéresser à la petite enfance. Je reste fidèle, par cette initiative, à la vision que mon père voulait de Maurice. C’est quelqu’un qui est toujours resté intègre en prônant des valeurs internationales.»

 

L’intégrité, c’est, dit-elle, la plus grande chose que lui a transmise son père : «Il me disait souvent : tu dois toujours être capable de te regarder dans le miroir. Il était parfois extrêmement dur, que ce soit avec moi ou mon frère Vickram. Il m’a toujours dit de toujours donner le maximum dans tout ce qu’on fait et c’est d’ailleurs une valeur que je fais en sorte de partager avec mes enfants : Meiya, 15 ans, et Nash, 14 ans. Il n’a pas toujours été présent, ma mère Swattee est celle qui a été le pilier de la famille…»

 

Si son père est un modèle pour elle à plusieurs niveaux, Lillka tient aussi beaucoup de son père au niveau de son caractère : «Je suis allée assez tard, l’année dernière, à Harvard – le sanctuaire de l’éducation dans le monde –, pour une année, avec mes enfants. J’ai fait un emprunt et je suis partie alors que tout le monde trouvait cela surprenant. On m’a demandé comment je pouvais aller faire des études alors que j’avais déjà deux masters. C’est cette recherche continuelle qui m’habite qui m’a poussée. Il n’y a pas d’âge pour essayer d’être une meilleure version de soi-même…»  Aujourd’hui, elle se lance dans un nouveau défi et elle espère que la JKC Foundation, une initiative qui lui tient énormément à cœur, prendra vite son envol…