Publicité

Accord électoral PTR-MMM : Échanges de (bons) vœux

22 septembre 2014

Les deux leaders au moment de la signature.

La table est dressée. Pour deux. Nappe blanche et… bouquet de fleurs aux couleurs de cet amour naissant. Du rouge et du mauve (un peu morbide pour une composition florale, non ?) pour aller avec les tentures qui parent la salle de conférence du Hennessy Park Hotel, ce samedi 20 septembre. Derrière, une ribambelle de garçons et de demoiselles d’honneur pour assister à cette union. Costumes-cravates et saris aux teintes improbables sont visiblement de rigueur. L’alliance PTr-MMM est sur le point d’être scellé par la signature de l’accord électoral, âprement négocié, terriblement désiré. Navin Ramgoolam et Paul Bérenger se diront «oui»… pour le moment. Le pire est soigneusement évité dans les discours. Reste le meilleur, rien que le meilleur.

 

Il est 10h50 et le chef de file du MMM débarque, tout sourire. Il serre des mains, embrasse ses nouvelles copines – Kalyanee Juggoo, Sheila Bappoo et Nita Deerpalsing –, et papillonne de conversation en conversation en attendant son «futur». Il s’entretient tantôt avec les membres de sa team, Alan Ganoo, Jayen Cuttaree ou encore Rajesh Bhagwan, pour ne citer que ceux-là. Tantôt avec les membres de celle de son nouvel allié, Anil Bachoo, Arvin Boolell et Patrick Assirvaden, entre autres. Quelques minutes plus tard, c’est Navin Ramgoolam qui débarque. Les deux protagonistes sont là et ont opté pour le bleu. Pour leurs chemises, bien sûr. Le PMSD, c’est de l’histoire ancienne.

 

Une mélodie retentit. Un peu comme une marche nuptiale. Et sur le grand écran, le slogan de la nouvelle alliance apparaît : «Un peuple uni. Un pays moderne.» Que c’est mignon. Le rouge et le mauve qui se marient, ce n’est pas très fashion. Mais c’est hautement politique ! Pas de cérémonial inutile, la signature du fameux accord est fait en deux temps, trois mouvements sous les applaudissements de la bande à Navin et de celle de «kamarad Paul». Et c’est le Premier ministre qui prend la parole en premier : «C’est un tournant décisif pour le pays. Nous ouvrons un nouveau chapitre de l’histoire. Nous faisons cet exercice en public, en toute transparence. Nous voulons montrer la confiance qui existe entre nous.»

 

Pour célébrer cet échange de – bons – vœux pour Maurice, le chef du gouvernement parle de cet accord «unique» (qui a été rendu public) : «Ce n’est pas un accord pour Paul Bérenger et Navin Ramgoolam. Mais un accord global  pour le pays.» Bientôt, affirme-t-il, deux comités mixtes seront mis en place pour travailler sur les lois pour la réforme électorale et sur le programme de l’alliance. Le chef du gouvernement a une pensée spéciale pour Alan Ganoo et Shaffick Hamuth : «Ils ont joué un rôle crucial dans la concrétisation de cette alliance.» L’ex-leader de l’opposition acquiesce tout sourire. Le bonheur est dans le regard de Navin Ramgoolam.

 

Les deux hommes sont sur la même longueur d’onde. Il n’y a pas de frictions sur leur ligne, affirment-ils. Et cela, même si des personnes malintentionnées tentent de semer la zizanie et de «met choula» entre eux. Paul Bérenger parle de lettre anonyme et d’une «certaine presse» : «Il faut que nous soyons sur nos gardes.» La prochaine étape : un grand meeting qui signifiera le départ de la campagne électorale. Même si les équipes sont déjà actives sur le terrain. D’ailleurs, vous devriez découvrir, ce matin, des banderoles «dans les quatre coins de l’île», arborant le slogan de l’alliance PTr-MMM. À l’heure des questions des journalistes, c’est toujours la même entente affichée. Pas de mot de travers. Pas de déclaration pour froisser son partenaire.

 

Même au sujet de la nouvelle carte d’identité, de Dan Callikan ou encore du futur de Rajesh Jeetha au sein de cette alliance, Paul Bérenger prend des pincettes. Sa mission : ne plus heurter son allié. Douceur et volupté. La fête se poursuivra, en petit comité (avec les mêmes absents du get-together de mercredi), autour d’un buffet et derrière des portes closes. Navin Ramgoolam et Paul Bérenger préfèrent célébrer en toute intimité…

 


 

Dan Callikan toujours à la MBC, Paul Bérenger réagit 

 

Le renouvellement du contrat de Dan Callikan pour trois ans a fait réagir cette semaine. L’homme proche de Navin Ramgoolam, qui est à la tête de la MBC, a été, pendant longtemps, la cible des critiques de Paul Bérenger. Ce dernier a fait le commentaire suivant, hier : «Keep cool. Navin et moi, nous en avons discuté. Nous sommes tombés d’accord. Et vous serez au courant en temps et lieu.»

 


 

Majorité de ¾ : aucun doute ! 

 

Pour que le prochain gouvernement – si l’alliance PTr-MMM remporte les élections – puisse aller de l’avant avec une réforme électorale et son projet de IIe République, une majorité de trois-quarts est indispensable. Navin Ramgoolam n’a pas de doute que ce sera le cas : «Je suis sûr que nous obtiendrons cette majorité.»

 


 

Rama Sithanen, l’élu

 

Ce sera lui le ministre des Finances du prochain gouvernement que formera l’alliance PTr-MMM, si elle remporte les élections. Navin Ramgoolam l’a confirmé : «Ce n’est un secret pour personne que Rama Sithanen  sera le futur ministre des Finances.»

 


 

L’accord électoral en points

 

Le programme électoral de cette alliance a pour but de maintenir la croissance économique et d’améliorer le bien-être économique et social des familles mauriciennes.  Au programme : des mesures économique, sociale, pour le développement durable, pour l’approfondissement de la démocratie, pour combattre la fraude et la corruption, pour la transparence et pour la bonne gouvernance.

 

Question réforme électorale : le first-past-the-post system maintenu, avec trois députés par circonscription - Rodrigues aura droit à trois députés – Pas plus de deux tiers des candidats ne seront du même sexe – Un seuil d’éligibilité de 10 % à la proportionnelle afin que les candidats sur les listes des partis puissent bénéficier du Best Loser System.

 

La IIe République : la Constitution sera amendée afin de prévoir des pouvoirs additionnels pour le président – Le président de la République et le vice-président seront élus grâce au suffrage universel – Le Premier ministre sera nommé par le président.

 

Les pouvoirs additionnels du président : il pourra dissoudre l’Assemblée nationale, présider le Conseil des ministres quand il le souhaitera, s’adresser au Parlement quand il le décidera – Il sera responsable de la politique étrangère du pays en collaboration avec le Premier ministre – Le Premier ministre devra prendre en considération les recommandations du président quant à la révocation d’un ministre.

 

Les nominations : le commissaire de police sera nommé par la Disciplined Forces Commission après consultation avec le Président et le Premier ministre – Le secrétaire du cabinet, le chef du service civil, le secrétaire financier, le Secretary for Home Affairs et celui des Affaires étrangères, les Senior Chief Executives, les Permanent Secretaries seront nommés par la Public Service Commission (PSC) après consultation avec le président qui consultera, lui, le Premier ministre – Le choix du Gouverneur de la Banque de Maurice, celui du directeur général de la MBC, celui des membres du Serious Fraud Office, reviendra au président, après consultation avec le Premier ministre – Le directeur de l’audit sera nommé par la PSC après consultation avec le président, le Premier ministre et le leader de l’opposition.

 

Les pouvoirs du Premier ministre : ses pouvoirs et ses responsabilités restent les mêmes.

 

Détails de l’alliance électorale : un partage équitable des tickets – La présence d’au moins un candidat de chaque parti dans chaque circonscription.

 

La formation du gouvernement : Navin Ramgoolam sera le Premier ministre et Paul Bérenger le Deputy Prime Minister dans un premier temps, jusqu’à ce que le changement constitutionnel ait lieu – Navin Ramgoolam sera alors candidat à la présidentielle et Jayen Cuttaree, président au poste de vice-Président – Le Deputy Prime minister sera issu du Labour Party ainsi que le numéro quatre du gouvernement. Le numéro trois sera un ministre mauve. Les postes de Chief Whip et de speaker seront attribués par le MMM. Alors que le Deputy Speaker viendra du camp rouge. Les portefeuilles des Affaires étrangères, des Finances et de l’Intérieur reviendront au PTr.

 

Le Permanent Coalition Committee. Un comité permettra de suivre l’évolution de l’alliance et de régler les problèmes qui surgiront.

 

Le Serious Fraud Office. Paul Bérenger l’avait exigé. Et il l’obtient en cadeau de mariage. De plus, si l’alliance PTr-MMM forme le prochain gouvernement, elle viendra de l’avant avec un Declaration of Assets Bill.

 


 

Ces questions sans réponses

 

Navin Ramgoolam et Paul Bérenger cultivent le flou depuis plusieurs semaines. Malgré la signature de l’accord électoral, les questions restent toujours sans réponses.

 

-       Qui prendra le leadership du PTr lorsque Navin Ramgoolam se présentera aux élections présidentielles ?

 

-       Quand auront lieu les élections législatives ? Navin Ramgoolam reste dans le vague : «Mon mandat prend fin en mai 2015.»

 

 

-       Est-ce que le nouveau leader de l’opposition, Pravind Jugnauth, aura l’occasion de poser une Private Notice Question ? Ou en d’autres mots, est-ce que le Parlement siégera à nouveau ?

 

-       La dissolution du Parlement est prévue pour quand ? Si Paul Bérenger aurait annoncé, lors d’une régionale du MMM, que le Parlement sera dissout entre le 5 et le 7 octobre, il y a quelques jours, il n’a pas voulu confirmer ses dires lors de la signature de l’accord : «C’est la prérogative du Premier ministre.»

 

 

-       Qui seront les candidats ?

 


 

Rajesh Jeetha et Vasant Bunwaree : out ?

 

Répondant à une question d’un journaliste sur ses propos, qualifiés de «louanges», concernant Rajesh Jeetha et Vasant Bunwaree, Navin Ramgoolam a précisé que c’était lui le chef du gouvernement, qu’il avalisait toutes les décisions et qu’il n’avait en aucun cas fait l’éloge de ces deux ministres. Paul Bérenger a, lui, qualifié les deux hommes de «ministres sortants» et n’a pas souhaité faire plus de déclarations à ce sujet. Le message semble être clair pour les deux hommes !

 


 

Du côté du MSM

 

■  Samedi 20 septembre. Lors d’un point de presse, Pravind Jugnauth a qualifié la signature de l’accord électoral entre le PTr et le MMM de «feuilleton de l’horreur». Pour lui, Navin Ramgoolam et Paul Bérenger font passer en priorité leurs ambitions personnelles alors que les Mauriciens «pe pas mizer». Le leader du MSM est persuadé, dit-il, que «le peuple se rallie derrière le MSM» : «Nous représentons un rempart contre la dictature.»

 

■  Vendredi 19 septembre. Lors d’un congrès à Quatre-Bornes, le leader du MSM a évoqué l’alliance MSM-PMSD-ML, qui offre, selon lui, une «alternance sérieuse» à la coalition rouge-mauve. Sir Anerood Jugnauth s’est également exprimé. Il estime qu’il y a des risques d’instabilité sous un gouvernement PTr-MMM. Il a également mis en garde la population : «À Maurice, nous avons enn lepep admirab. Kontinye admire ! J’espère que la population a commencé à raisonner. Les gens ne sont pas bêtes. Mais parfois, zot deklar bet. Sa fwa la si lepep pa ouver so lizie, mo pa pou ena pitie si zot le al ver le swisid.»

 

■  L’alliance de l’opposition : ça se finalise. L’heure est à l’action. Et après plusieurs jours de tergiversations et de discussions, l’alliance MSM-PMSD-ML devrait être finalisée. Dans les prochains jours, les principaux acteurs de cette nouvelle coalition devraient discuter de programme et d’investiture. Et le lancement de l’alliance aura lieu, s’il n’y a pas de grosses divergences, dans quelques jours.

 


 

Il ne fallait pas rater ça…

 

■   Un get-together rouge-mauve. Inoubliable : Nita Deerpalsing et Rajesh Bhagwan qui s’embrassent après des années de guéguerre. C’était le mercredi 17 septembre, lors de la rencontre amicale entre certains membres du PTr et du MMM. Comme de nombreux ministres (Hervé Aimée, Vasant Bunwaree, Shakeel Mohamed, Jim Seetaram, Mireille Martin, Tassarajen Pillay Chedumbrum, Michael Sik Yuen, Cader Sayed-Hossen, Rajesh Jeetah, Suttyhudeo Mootia et Mukeshwar Choonee) n’étaient pas présents, beaucoup y ont vu un signe : ces derniers ne seraient pas sur la liste de candidats de Navin Ramgoolam. Ce dernier n’a pas tardé à apporter une précision : son choix n’est pas encore fait !

 

■  Harish Boodhoo se lance. Celui qui avait pris sa retraite politique sort de son silence. Une nécessité car la démocratie est menacée, selon lui. Du coup, il a animé un point de presse, cette semaine, et a déclaré qu’il souhaite que les partis de l’opposition unissent leurs forces avec les syndicalistes pour contrer la machinerie rouge-mauve. De plus, il a avoué qu’il était prêt à soutenir Sir Anerood Jugnauth : «Je suis prêt à excuser SAJ dans l’intérêt du pays.»

 

■  Pravind Jugnauth, leader de l’opposition. Après la démission de Paul Bérenger, le lundi 15 septembre, c’est au leader du MSM de se charger de diriger l’opposition. Néanmoins, ce n’est pas certain qu’il puisse agir à l’Assemblée nationale (la dissolution du Parlement pourrait arriver avant la reprise des travaux parlementaires). Et il en est bien conscient, même s’il espère avoir la chance de poser une Private Notice Question (PNQ) : «J’ai déjà commencé à travailler sur un nombre important de PNQ (…) Le peuple peut s’assurer que nous élargirons l’espace démocratique. Nous soulèverons tous les sujets importants qui concernent la population», a-t-il déclaré en conférence de presse, après sa nomination.

 

■  Jameel Peerally et son… JPM. Jeune Patriote Mauricien, c’est le nom du parti politique lancé par l’activiste Jameel Peerally. Ce nouveau mouvement vient rejoindre la liste des nouveaux partis qui ont vu le jour ces derniers temps.

 


 

Paul Bérenger et la carte d’identité nationale

 

Il attend, dit-il, les jugements de la Cour suprême concernant l’anticonstitutionalité de la nouvelle carte d’identité nationale avant de se prononcer. Néanmoins, il a des «craintes» concernant le stockage des informations : «Les hackers sont de plus en plus efficaces. Je me demande si c’est vraiment nécessaire d’avoir une banque de données centralisée.» Par ailleurs, cette semaine, Rao Rama, le Project Director du Mauritius National Identity Card Scheme, a tenu à rassurer les Mauriciens : le processus d’enregistrement se poursuivra après le 30 septembre. D’autre part, les jugements dans les deux procès concernant la contestation de ce nouveau document d’identité devraient être prononcés dans les jours à venir.

Publicité