Sa jupe ne virevoltera plus au son du tambour et sa voix ne résonnera plus. Mimose Furcy (photo), 67 ans, s’est éteinte ce mercredi 12 juillet. Figure incontournable de la communauté chagossienne, elle s’est fait connaître, non seulement à travers le séga tambour des Chagos mais aussi à travers par sa chanson Mo ti ena 13 ans, qui raconte sa reconstruction loin de sa terre natale après son expulsion des Chagos à cet âge.
Suzelle Baptiste, la secrétaire du Groupe réfugiés Chagos (GRC) à Maurice confie que ce décès laisse une tristesse et un vide inexplicables au cœur de la communauté chagossienne. «Elle était comme une maman pour nous et avait toujours de bons conseils. Mimose était appréciée pour sa jovialité, son grand cœur, et elle était toujours accueillante envers tout le monde. Son implication au sein du GRC, durant ces 40 années d’existence a été remarquable, surtout son franc-parler. Elle disait toujours : "Monn dir zot, zot kontan ou pa, pourvi mone dir." Son départ subit nous brise le cœur. Elle ne sera jamais oubliée.»
En 2019, c’est une Mimose fière et heureuse qui nous avait parlé lors de l’inscription du séga tambour des Chagos sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’Unesco à Bogota, en Colombie, lors de la 14e session du comité intergouvernemental de sauvegarde de l’héritage culturel immatériel. La chanteuse et fondatrice du Group Tambour Chagos ne pouvait contenir sa joie. «Cela fait 20 ans que je m’occupe du groupe. Le fait de savoir que notre séga tambour a eu une telle reconnaissance est une joie et une fierté indescriptibles. Cet accomplissement est une autre manière de valoriser et de faire reconnaître la culture et la langue chagossienne. C’est aussi la reconnaissance de notre lutte qui dure depuis des années et un hommage à nos aïeuls.»
Elle a mené un combat enfiévré pour son peuple et avait aussi cette soif de faire connaître l’histoire et la culture chagossienne au plus grand nombre. En mars dernier, elle nous confiait que le 30 mars 2023 marquait la 55e année de sa déportation à Maurice et aussi du combat incessant que mène la femme chagossienne. «La femme chagossienne est solide, débrouillarde et sa vie a toujours été rythmée de multiples combats. Et, moi, je suis contente de pouvoir me servir de la musique, à travers mon groupe Tambour Chagos, pour raconter l’histoire des Chagossiens aux autres, et, surtout, aux jeunes, car je ne souhaite pas que notre histoire ou notre culture soit oubliée.»
Pour danser sur le séga tambour des Chagos, les membres de la troupe disaient qu'il fallait tourner comme une toupie tout en gardant les pieds collés au sol. Une peu à la manière de Mimose qui a été comme une toupie dans la vie de tous ceux qui l’ont côtoyée, tant par sa façon d’être, son récit et sa lutte pour que la culture chagossienne dépasse les frontières.