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2 mai 2025 15:26
Acteur de la société civile, penseur et amoureux de Maurice et de son histoire, Alain Jeannot évoque un sujet qui rappelle au besoin de prendre soin de soi.
Le bonheur et la santé sont indissociables. D’ailleurs, des six critères utilisés par le Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies pour le mesurer, figure «l’espérance de vie en bonne santé». Or, si l’espérance de vie moyenne des Mauriciens est de 70.2 ans pour les hommes, 77 ans pour les femmes, certaines données tendent à indiquer que les soucis de santé s’installent prématurément au cours de leur existence. Par exemple, le diabète et les maladies cardiovasculaires, qui sont des maladies chroniques, sont responsables de plus de 50% des décès. Même si une bonne qualité de vie peut être assurée avec un contrôle médical adéquat, ces maladies impliquent certaines contraintes pour ceux qui en sont touchés.
Nous ne pouvons, donc, pas prétendre que les quelque 70 années de vie accordées, en général, au Mauricien se passent dans la quiétude d’une bonne santé. Est-il, donc, possible d’améliorer notre capital santé ? Si oui, comment ? Voila des questions prioritaires que nous ne nous posons que trop rarement. En effet, la santé, à l’image du bonheur, est une valeur discrète ; elle ne fait du bruit que lorsqu’elle claque la porte en quittant la pièce. De ce fait, nous avons tendance à lui accorder moins d’importance jusqu’au jour où son assourdissant départ se solde par bien de fâcheuses conséquences.
Est-ce normal que les ménages mauriciens consacrent 10.6% de leurs budgets à l’alcool et le tabac dont la consommation abusive est nocive à la santé, alors qu’ils n’utilisent que 2% de leurs revenus aux sports et aux loisirs ? Pourquoi avons-nous tendance à être plus enclins à inclure ces produits intoxicants dans nos habitudes que bien d’autres nations insulaires telles que Singapour où la consommation d’alcool pur par citoyen âgé de plus de 15 ans est inférieure de presque 4 fois à celle du Mauricien ? Est-ce un conditionnement culturel, un manque de communication agressive et soutenue par rapport aux dangers de ces produits, une insuffisance de loisirs sains ou une combinaison de cette liste non-exhaustive ?
Ces interrogations mériteraient une considération constante à tous les niveaux car l’environnement évolue rapidement. De nos jours, par exemple, la publicité qui promeut les boissons alcoolisées, interdite en public, est présente sur les réseaux sociaux où elle touche particulièrement les jeunes, s’associant aux événements culturels et récréatifs. Il est clair que la prohibition n’est pas une réponse mais l’éducation en est une ! C’est pour cela que la sensibilisation et les politiques dissuasives avant-gardistes à la consommation abusive seraient salutaires.
D’autre part, est-ce admissible que 40% des étudiants Mauriciens âgés entre 13 et 17 ans ont, après l’école, des activités sédentaires telles que regarder la télé, jouer sur l’ordinateur ou parler aux amis ? Est-ce normal que seul 19% d’étudiants de cet âge fassent au moins une heure d’activité physique par jour ? Serions-nous étonnés que 25% des jeunes soient en surpoids avec tout ce que cela implique comme risque ultérieur à la santé ? Alors, que faisons-nous devant cette situation ? À quand, par exemple, la relance des intercollèges avec l’engouement pré-régionalisation ?
La qualité de notre santé dépend aussi, manifestement, de la salubrité environnementale, que ce soit au niveau de l’air que nous respirons ou de la propreté et la sécurité des espaces publics. Or, avec un parc de véhicules qui augmente de 5% par an et qui contribue 1.5 giga tonne de CO2 annuellement à l’atmosphère, l’avenir n’est pas très encourageant en l’absence de mesures mitigatives, telles que les incitations à utiliser le transport en commun et faire du covoiturage.
Quant à la sécurité des espaces publics, contrôler davantage la délinquance, entretenir les infrastructures piétonnières et faire reculer la présence des chiens errants pourraient encourager une population qui marche et respire !
Enfin, et surtout, valoriser et encourager le personnel médical. Depuis que la bourse d’Angleterre a été instituée en 1818, la plupart des lauréats ont opté pendant longtemps pour deux études : droit ou médecine. Depuis, les trois dernières décennies, la tendance a commencé à changer. S’il est vrai que la palette d’activités professionnelles a évolué offrant plus de choix, il n’est pas moins vrai que les conditions de travail, y compris les salaires des médecins, ont tendance à peser moins lourd dans la balance que d’autres aventures professionnelles. L’île Maurice compte 3 840 médecins et 3 796 nurses (en 2023) ; est-ce suffisant pour s’occuper de 5.1 millions de patients qui se rendent aux hôpitaux, dispensaires et autres mediclinics par an ?
La santé est la plus grande des richesses. Une famille en bonne santé devrait être une famille heureuse, tout comme une nation en bonne santé. Toutefois, c’est une valeur qui demande entretien et habitudes préventives. Investir dans la santé, ce n’est ni une perte de temps, ni un gaspillage d’argent. En faire un adage nous éviterait bien de naufrages.
Bibliographie
Global School Based Student Health Survey Mauritius Fact Sheet 2017 (2017).
John F. Helliwell, R. L. (2023). World happiness report.
Ministry of Finance, e. p. (2023). Mauritius in figures.
PAR ALAIN JEANNOT
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