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12 juillet 2025 20:03
Il persiste. La grève de la faim est un terme qui est revenu souvent au cours de la semaine, avec celle de Dave Kissoondoyal, ancien militant du MMM, qui lutte, à travers son action, contre la pension universelle qui passe à 65 ans, avec aussi la plate-forme Pa touss nou pen-sion qui brandit la menace de plusieurs grèves de la faim à travers l’île. Une liste qui s’allonge avec ces personnes qui, dans le passé, ont entamé des grèves de la faim pour tellement de raisons. Plusieurs de ces anciens grévistes analysent cette action de ne pas s’alimenter pour faire avancer une cause…
Aujourd’hui, c’est son neuvième jour de grève. Dave Kissoondoyal, ancien militant du MMM mais aujourd’hui plus proche du MSM, n’en démord pas, et à l’heure où nous mettions sous presse, il poursuivait sa grève de la faim entamée depuis le 5 juillet pour dire non à la pension de vieillesse qui passera progressivement de 60 à 65 ans. Hélas, dans l’après-midi, on apprenait que son état de santé n’était pas au top et qu’il avait dû être hospitalisé d’urgence.
Hier matin, Dave Kissoondoyal adressait une lettre à la Mauritius Broadcasting Corporation pour n’avoir toujours pas couvert sa grève de la faim, en ne manquant pas non plus de nous donner sa définition d’une grève de la faim : «Une paisible mais grave protestation (...)» tout en disant que sa cause est «d’importance nationale, pour la justice et la dignité.»
Justement, on a posé la question à d’anciens grévistes sur cette action où ils restent pendant de longs jours sans manger, quitte à être malade avec des risques de perdre la vie même : est-ce que ça marche ? L’un des récents grévistes est Nishal Joyram, citoyen qui en décembre 2022, entamait une grève de la faim pour la révision à la baisse des prix des carburants. 22 jours plus tard, il y avait mis fin. Il nous dit que «certes, le prix des carburants n’a pas baissé pour autant après ma grève, mais il y a eu une vraie prise de conscience dans le public, où les autorités ont été aussi obligées de venir de l’avant pour expliquer les mécanismes autour des prix des carburants. Donc, outre l’acte lui-même, qui prend beaucoup de soi, sans oublier l’entourage pour qui c’est tout aussi dur, sinon plus, la grève de la faim aide à faire avancer une cause, il y a une conscientisation, car derrière le gréviste, il y a un message, une lutte qui concerne beaucoup plus de monde.»
Autre nom qui est revenu souvent ces dernières années : Clency Harmon, qui luttait contre la dépossession des terres et la restitution de celles-ci notamment aux descendants d’esclaves et de coolies, et qui a entamé plusieurs grèves de la faim, notamment en 2019. Le président de l’association* Justice, Restitution et réparation*, tout en nous disant son ras le bol avec sa cause qui selon lui, n’a pas avancé depuis que le nouveau gouvernement est en place, nous déclare que *«en ce qui me concerne, la grève de la faim était un recours pour faire entendre une voix qu’on n’entendait pas. Quand on frappe à tellement de portes, quand on veut des rencontres, des discussions, et que les autorités jouent les sourds, tout en laissant l’injustice se faire et continuer, la grève de la faim est cette voix, pour le gréviste et pour les personnes concernées par cette cause.» *
Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des Consommateurs de l’Ile Maurice (ACIM) a aussi connu son lot de grèves de la faim. En 2010, il entamait une grève de 13 jours, pour lutter contre le fait que l’ACIM n’avait plus de subventions de l’Etat depuis un an. Puis, place à une grève de seize jours en 2017, pour dire non au projet Metro Express. Selon lui, «c’est une forme de lutte, qui a une raison d’être encore aujourd’hui, une utilité, et qui est bien sûr toujours aus-si puissante, puisqu’il en va de la vie d’une ou plusieurs personnes. Il y a aussi d’autres facteurs à prendre en compte avant d’initier une grève de la faim. Est-ce que la cause est juste ? Est-ce qu’elle va rassembler du monde ou le grand public ? Est-ce que le gouvernement présent va entendre la voix d’un gréviste ? Dans le cas de Kissoondoyal, on a un médecin, Navin Ramgoolam, et un deputy Prime minister, Paul Bérenger, qui a déjà été gréviste dans le passé, donc ils peuvent comprendre ce que revendique le gréviste dans un certain sens.»
Et ce n’est pas une question d’hommes uniquement. On pense notamment à la syndicaliste Jane Ragoo : en 2003, elle entame une grève de la faim de neuf jours, après que la compagnie* White Sand Tours* a licencié 60 chauffeurs. Puis en 2017, elle sera du côté de femmes cleaners qui ne recevaient que Rs 1 500 de salaire, pour une grève de la faim pour dire non à cela. Elle est convaincue que la pertinence d’une grève de la faim a beaucoup aidé : *«Les faits parlent d’eux-mêmes : pour White Sand Tours nous avons eu un Renumeration Order pour les tours opérateurs, et dans le cas des cleaners, le salaire minimum a finalement été introduit, à l’époque à Rs 8 500. Donc, oui, les grèves de la faim sont des outils de pression forts, toujours d’actualité pour faire connaître et avancer des causes. Le tout est de surtout bien s’organiser. Seul, on ne peut pas y arriver, il faut une équipe, du soutien, ce n’est pas le gréviste, tout faible, qui va aller négocier avec les autorités, par exemple.» *
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