Les principaux animateurs de la Plateforme qui milite contre la construction d’une centrale à charbon à Pointe-aux-Caves : Georges Brelu-Brelu, Alain Nayna, Fabiani Balisson, Zaheer Allam et Yannick Cornet.
Banderoles, réunions d’explication et soutien de personnalités, (ici l’océanographe Vassen Kauppaymuthoo), la Plateforme agit sur le terrain.
Une centrale à charbon ? Ils n’en veulent pas ! Et pour faire entendre leur voix, ils se mobilisent…
Une lueur d’espoir. Elle brille en eux avec force et éclaire la route de leur combat, celui qu’ils mènent contre la construction et l’activité de la centrale à charbon de CT-Power qui sera appelée, si elle devient une réalité à Pointe-aux-Caves, à produire de l’électricité. Une étincelle qui maintient allumée la flamme de leur motivation. Et ils souhaitent partager cette lumière, qui ne carbure ni au fioul ni au charbon, avec le plus grand nombre afin de remporter leur bataille.
Alors, les principaux animateurs de la Plateforme citoyenne réunissant l’Action civique d’Albion Plage et le Mouvement civique de Pointe-aux-Sables multiplient les actions sur le terrain, à travers des réunions d’information et de mobilisation qu’ils tiennent, les jeudis, depuis plusieurs semaines déjà. Après Pointe-aux-Sables et Albion, ils étaient à Petite-Rivière, cette semaine.
Ces hommes qui s’engagent et qui militent pour que le projet de CT-Power ne voie pas le jour mais aussi pour attirer l’attention des autorités, dont ils déplorent le silence, sur les nombreux impacts négatifs (sur l’économie, la santé des habitants des régions avoisinantes, entre autres) de la centrale. Ils réclament également un engagement en faveur des énergies renouvelables de la part de nos décideurs et des garanties du gouvernement (si, dans le pire des cas, la centrale voit le jour) concernant le contrôle strict des émissions. Ils se penchent aussi, avec leurs hommes de loi, sur une éventuelle action légale.
Yannick Cornet, Fabiani Balisson, Zaheer Allam, Alain Nayna de l’Action civique d’Albion Plage et Georges Brelu-Brelu du Mouvement civique de Pointe-aux-Sables ont un même objectif. Si la plupart d’entre eux ne se connaissaient pas au préalable, c’est pour œuvrer pour la même cause qu’ils ont uni leurs forces. Et l’aventure «anti-centrale à charbon» a réellement commencé, il y a quelques mois. Plus précisément quand le tribunal de l’Environnement a validé le projet de CT-Power. Les investisseurs, des Malaisiens, avaient contesté la décision du ministère de l’Environnement de leur avoir refusé un permis EIA (Environmental Impact Assessment).
Au lendemain du jugement, Zaheer Allam, étudiant en architecture biologique, qui vient de compléter deux Masters, a lancé une pétition en ligne pour dire «non» au projet. «Je ne comprenais pas comment il était pensable qu’on pouvait aller de l’avant avec un tel projet !», confie le jeune homme, qui habite le nord de l’île. Vous pouvez d’ailleurs la signer en accédant au lien suivant : http://www.avaaz.org/en/petition/Not_to_coal_power_plants_in_Mauritius.
À quelques heures près, le même jour, Fabiani Balisson lançait le groupe Facebook : «Say NO to Coal !». Cet habitant de Roches-Brunes ne pouvait croire qu’un projet énergétique polluant aller voir le jour sur cette si belle partie du littoral ouest : «J’habite à quelques minutes d’Albion. J’ai de très bons souvenirs de journées à la plage, de plans boulettes, je ne veux pas qu’une centrale vienne gâcher tout ça !» Les deux jeunes, suite à leurs initiatives respectives, se rencontrent virtuellement avant de décider de s’organiser dans le «réel» avec les représentants d’associations d’Albion et de Pointe-aux-Sables, les deux régions les plus proches de Pointe-aux-Caves : «Il s’agit pour nous de mettre la pression. Le silence des autorités ne s’explique pas.»
Alternatives vertes
Ensemble, c’est un travail de fourmis que ces hommes accomplissent. Afin de faire valoir leur point de vue, de pouvoir le faire comprendre, ils se sont documentés : ils connaissent le dossier sur le bout des doigts et en discutent, chiffres et exemples édifiants à l’appui. «Le charbon serait moins cher ? Il a augmenté de 70 % ces dernières années», confie Yannick Cornet. De quoi faire réfléchir ! «Le phare d’Albion mesure 30 mètres. Les cheminées de la centrale seront de 110 mètres. On les verra de loin, de très loin même. Les touristes de la région ouest auront une très belle vue sur une centrale», relève Alain Nayna. Georges Brelu-Brelu le sait, l’impact sur la santé sera non négligeable : «À combien de cas de cancers, de problèmes respiratoires, entre autres, devrons-nous faire face ?»
Ils n’ont rien laissé au hasard. «Bien sûr, la centrale devra respecter dix conditions bien spécifiques afin de pouvoir opérer, mais à Maurice, a-t-on l’expertise et le savoir-faire afin de vérifier si elles sont toutes respectées ? Et puis, comment pourrons-nous être sûrs que c’est le cas ?», poursuit-il. Que le CT-Power soit la seule alternative pour la prévention d’un «black-out», les animateurs de la Plateforme n’y croient pas : «Il y a d’autres alternatives vertes à mettre en place. Nous les connaissons, le gouvernement également. Ils se doivent d’investir dans une gestion éco-consciente des ressources énergétiques. Où est passé le concept Maurice Île Durable ? D’ailleurs, où est Joël de Rosnay ? Nous lançons un avis de recherche», lance Fabiani Balisson.
Et ces hommes engagés le savent, seules, les régions de l’Ouest ne pourront mener ce combat. C’est pour cela qu’ils lancent un appel à tous les Mauriciens afin que la lueur d’espoir se propage…
Des raisons contre le charbon
Dix raisons avancées par la Plateforme pour dire non à la centrale à charbon :
%Ï D’autres bouchons. 1 600 tonnes de charbon transportées par 54 camions quotidiennement vers la centrale, ça en cause.
%Ï De la pollution atmosphérique. L’air ne sera plus jamais le même. Les émissions de cendres et de gaz pourront être diminuées mais pas complètement effacées. Yannick Cornet précise que dans les grands pays une zone tampon de 10 km est prévue autour de la centrale : «Une chose impossible pour Maurice qui ne fait que 30km de long !» D’autre part, Alain Nayna rappelle que ces particules atteindront même les régions des hautes Plaines-Wilhems.
%Ï Des carbocendres. Elles sont chargées de métaux et peuvent provoquer des pluies acides.
%Ï Dans le sol. Les carbocendres enfouies dans le sol sans précaution peuvent contaminer les nappes phréatiques et les sols.
%Ï Stockage. Ces carbocendres sont stockées dans des bassines. Qu’arrivera-t-il s’il y a une fuite ?
%Ï Gaz à effet de serre. Plus de 900g de CO2 par kWh !
%Ï Faune et flore. Pompage d’eau de mer au programme afin de refroidir la centrale. Et les baleines, cachalots et dauphins ?
%Ï Des gens. Albion est la région de l’île qui a connu la plus importante poussée démographique. En 11 ans, la population a augmenté de 85 %. Il ne s’agit donc pas d’une région isolée, s’indigne Fabiani Balisson : «Les habitants seront-ils comme ceux de Mare-Chicose ? Faudra-t-il les pousser à déménager et aller vivre ailleurs ? Nous ne voulons pas en arriver là, c’est pour cela que nous nous battons, maintenant.»
%Ï Les terrains. La Plateforme prévoit une baisse considérable de la valeur des terrains dans les régions avoisinantes de Pointe-aux-Caves.
%Ï Le charbon. Un matériau moins cher que l’huile lourde mais polluant. De plus, il s’agit d’une énergie fossile dont les ressources, même si elles sont importantes, s’épuiseront un jour, estime la Plateforme. C’est pour cela qu’elle se demande s’il ne serait pas plus judicieux de se tourner vers les énergies renouvelables.