Le bassin a retrouvé une certaine sérénité…
Santa Ramdoyal et Damountee Bassodersing ne s’inquiètent pas vraiment.
Des centaines de tilapias, d’anguilles et de carpes retrouvés sans vie dans un bassin qui ressemble à tant d’autres. Comment les habitants de la localité réagissent ?
Une pêche miraculeuse ? Il y a des poissons à profusion, certes. Mais le côté positif de l’histoire s’arrête là. Des centaines de tilapias et de carpes morts qui s’entassent sur les berges d’un lac… Ça a de quoi donner des frissons dans le dos. Une vision d’horreur, en somme. Celle des habitants d’un petit village qui se situe dans le district de Moka, il y a quelques jours. Et même si, très vite, les cadavres ont été retirés, quelques jours plus tard, une odeur désagréable émane toujours du lac de Valetta.
Cette grande étendue d’eau, bordée de plages de gazon où poussent de magnifiques sapins, est l’endroit où les villageois se retrouvent pour pêcher, prier ou tout simplement prendre un bol d’air frais. Mais depuis quelques jours, des officiers du ministère de l’Environnement et de la pêche ont dépêché des officiers pour prévenir les habitants de cette région : il ne faut pas pêcher dans le bassin ni en consommer l’eau. Des prélèvements ont été envoyés à des fins d’analyse en début de semaine.
Dans ce coin de l’île, tout le monde – ou presque – a sa petite idée sur ce qui est arrivé. Pollution industrielle, maladie des poissons, coup du sort, mauvais présage…Chacun y va de son «mwa se ki mo pense». Mais discrètement, bien sûr. Les explications sont toujours précédées d’un «mo pa kone kinn arive». Toute opinion n’est pas bonne à partager. Surtout dans ce petit village… désert, en ce début d’après-midi, ce mercredi 6 novembre. Quelques autobus empruntent la route principale. Une famille qui n’habite pas la localité est venue voir le fameux bassin. Et Jean Clency Nibat s’apprête à aller se préparer des nouilles instantanées.
Les poissons morts, ce n’est pas qu’il n’en a rien à faire. Mais ce n’est pas la première fois que ça arrive, selon lui. Alors, il ne s’inquiète pas vraiment. D’ailleurs, il ne pêche pas et ne consomme pas l’eau du lac : «Il y a l’eau du robinet», déclare-t-il, le regard un peu dans le vague. À quelques pas de là, Devanand Luckeeram travaille dans son snack. Lui s’inquiète.
«Spectacle désolant»
Il était un des premiers sur les lieux après que la nouvelle de la découverte des cadavres dans le lac se soit propagée dans toute la localité ou presque : «Il y avait de vraiment gros poissons, des anguilles… C’était un spectacle vraiment désolant.» Pour lui, il s’agit d’une catastrophe : «Je me demande s’il y a encore des poissons dans ce lac ! Je ne crois pas qu’on pourra y pêcher encore. Ou, du moins, pas avant des années.» L’odeur désagréable ne lui a pas échappé. Alors, il se demande si les habitants de la région ne respirent pas un «mauvais air» : «Tout cela est bien étrange.» Il espère que les choses rentreront dans l’ordre très vite.
Et il n’est pas le seul, semble-t-il. Daya Apadoo, Santa Ramdoyal et Damountee Bassodersing n’aiment pas que ce genre de chose arrive dans la localité. Elles aiment le calme des journées, la douceur de vivre, la routine et son aspect rassurant. D’ailleurs, elles se retrouvent, ce mercredi-là, comme tous les jours d’ailleurs, chez Daya. Cette dernière attache des balais et fait un brin de causette. Elle l’avoue, elle ne sort pas vraiment : «C’est grâce à ma fille, qui est venue de Goodlands, que j’ai su qu’il y avait un problème.» Pourtant, elle habite à moins de deux minutes du bassin.
Ses enfants ne pêchent pas. Ses petits-enfants ne s’amusent pas près du lac. Et à force d’avoir côtoyé un endroit pendant des décennies, on n’oublie d’en profiter, aussi beau soit-il. Solange Troubadour est dans la même situation. Alors que le temps s’est un peu rafraîchi, elle attend le bus pour aller se promener un peu. Elle passe devant le bassin régulièrement sans vraiment y faire attention. Des poissons morts ? Tant qu’elle n’a pas de problème de santé et qu’elle n’a pas à consommer cette eau, tout va bien : «Je ne m’occupe pas de ce genre de chose.» Comme elle, d’autres habitants du village ne s’intéressent pas au problème. Une pluie de «nu pa konn nanye» s’abat, alors que des nuages gris envahissent le ciel bleu. La pluie ne va pas tarder.
Gashen Pillay, lui, trouve que des poissons morts en si grande quantité, c’est très inquiétant. Alors, il espère qu’une explication «naturelle» soit trouvée à cette situation peu naturelle : «Certaines personnes disent que c’est juste un accident.» Il aimerait bien y croire…
Des résultats bientôt
Une hausse de la température de l’eau ? Un empoisonnement ? De la pollution ? Qu’est-ce qui a provoqué la mort de cette centaine de poissons ? Des échantillons ont été collectés à des fins d’analyse. Si les résultats devaient être connus cette semaine, cela n’a, visiblement, pas été le cas. De son côté, le District Council de Moka dit n’avoir aucun document en sa possession. Néanmoins, il semblerait que les résultats des analyses seront bientôt connus.