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Un parfum de mafia sur le dos des contribuables

12 avril 2025

Comme une série produite par la FCC, avec ses épisodes à rebondissements et ses personnages qui, hier encore, partageaient la même table, mais qui, aujourd’hui, s’accusent mutuellement de faits répréhensibles ! Après la scène impliquant Jugnauth – accusé d’avoir remis des valises contenant plus de Rs 113 millions à son ancien ami Deelawon pour qu’il les garde en lieu sûr –, un nouveau chapitre s’ouvre avec l’arrestation de Padayachy, ancien ministre des Finances.

La déclaration explosive faite aux enquêteurs de la FCC – selon laquelle l’ex-grand argentier aurait proposé une somme de Rs 5 millions à Harvesh Seegolam, ancien gouverneur de la Banque de Maurice, pour faciliter certaines transactions frauduleuses — a choqué une opinion publique déjà lassée par cet incessant défilé devant la FCC où les révélations de transactions douteuses se comptent en milliards de roupies.

C’est ainsi qu’on aura assisté à une confrontation à distance entre les principaux protagonistes, essentiellement un match opposant Seegolam-Padayachy. Si les deux hommes se confient uniquement aux enquêteurs de la FCC, leurs avocats se montrent, pour leur part, volubiles face aux caméras. Bhadain et Gulbul s’affrontent, dans cette affaire, avec leur style respectif, dans une joute verbale, chacun défendant avec force l’innocence de son client.

Selon Bhadain, «mo kliyan inn donn tou seki li kone avek so bann prev (…) Gras a so explikasion, pou met lord dan sistem-la. Li’nn explik tou involvement enn ansien minis finans dan enn hotel project». En face, c’est un Gulbul sûr de lui qui donne la réplique : «Sa case-la li baze lor enn alegasion (...) Ou pa kapav met enn alegasion lor enn lot alegasion pou fer li vinn prev (...) Pran case-la pli vit ki kapav. Sekter finansie Moris pe soufer avek sa bann kalite case-la.»

Au-delà des formules des deux avocats aguerris, chacun touche un point capital : d’un côté, Gulbul réclame une procédure judiciaire rapide avec raison, de l’autre, Bhadain mise sur les révélations de Seegolam pour remettre de l’ordre dans le système. Deux positions qui font écho aux attentes d’un public dégoûté devant une série de troublantes révélations et qui n’attend que justice et vérité, tout en espérant que cette affaire – qui entache la réputation de notre pays – soit jugée dans les plus brefs délais.

Tout ce spectacle médiatique auquel on est convié quotidiennement avec son lot de nouvelles accusations, de soupçons, de malversations concernant plusieurs dirigeants de sociétés privés accusés d'avoir obtenu des financements de manière frauduleuse, ressemble à une mafia politique qui s’est développée sur le dos des contribuables.

Pendant que la population pansait ses plaies en période de Covid et de post-Covid, deux pôles avaient pris naissance en cristallisant toutes les dérives du copinage. Il y a d’abord l’Emergency Procurement avec des contrats publics alloués à des proches du pouvoir, souvent sans appels d’offres ni compétences dans le domaine sanitaire, débouchant sur des scandales à l’exemple de l’achat des respirateurs artificiels Pack and Blister et des comprimés Mulnupiravir.

L’autre axe est la MIC (Mauritius Investment Corporation) qui a été mise sur pied pour soutenir les entreprises en difficulté, mais qui apparaît, ces jours-ci, comme un outil détourné ayant servi les intérêts privés de l’entourage du précédent régime. C’est Ramgoolam qui a rajouté une couche lors de la dernière séance parlementaire en affirmant qu’il y a eu un «détournement flagrant des fonds publics», avec d’énormes sommes «versées aux proches du précédent régime». Les exemples cités par le Premier ministre : Rs 41 millions à Kuros Construction Solutions Ltd, Rs 64 millions à RGT (Healthcare) Ltd) et Rs 9,6 millions à l’hôpital Artemis.

Est-ce que certains dirigeants du précédent gouvernement sont coupables d’avoir participé à un vaste système de blanchiment d’argent sous couvert d’aides de l’État ? Est-ce que les accusations s’arrêteront uniquement à l’ex-grand argentier ou d’autres anciens ministres et hauts cadres seront-ils également inquiétés ? Qui sont les prochains camarades qui se dénonceront mutuellement, donnant à toute cette affaire une allure de série à rebondissements ?

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