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23 mai 2025 19:44
L’auteur, que vous pouvez contacter à cette adresse : pagepi1904@gmail.com, évoque la spécificité des métiers du théâtre et la nécessité pour ceux qui dirigent de se mettre à la page.
Monsieur le ministre des Arts et de la Culture, l’Honorable Mahen Gondeea, a de bonnes raisons de claironner que le Théâtre de Port-Louis, et le Trafalgar Hall (inconsidérément rebaptisé Théâtre Serge Constantin), rénovés (enfin!), vont rouvrir leur rideau respectif.
Pour l’un et l’autre, ce n’est pas la première rénovation qui, inéluctablement, pourrait en générer d’autres pour les mêmes évidentes raisons.
Depuis des décennies, la toute première demeure l’incompétence, la désinvolture et la négation de l’action culturelle, alimentées par tant de générations de «responsables» municipaux.
À leur décharge, une municipalité n’a pas la vocation ni la méthodologie adéquate afin de gérer une entreprise culturelle aussi spécifique qu’un théâtre (qui plus est patrimonial historique).
L’ensemble des codes administratifs municipaux est totalement inadapté pour répondre aux impératifs professionnels de la régie d’un théâtre. De plus, l’effectif fonctionnaire de ce type d’institution ne compte aucun expert avéré dans ce domaine. Comme exemple, les techniciens catégoriels du théâtre sont assimilés à des agents communaux, et corvéables à merci.
Ainsi, le soir, un régisseur lumières peut assurer la vêture lumineuse d’un spectacle, et le lendemain matin, être réquisitionné... pour changer les ampoules d’un éclairage public ! Pour la mairie, de façon basique, il reste un «électricien». Une singularité mauricienne à l’international.
Par ailleurs, la maintenance des locaux et des équipements techniques n’est jamais diligentée régulièrement, faute de prévisions budgétaires systématiques. Soit une des causes d’une rénovation urgentissime après des années de coupable jachère.
Dès lors, une rénovation «esthétique» ne saurait palier aux carences flagrantes de ces théâtres, en termes d’efficience des équipements techniques et des personnels émérites. D’autant après toutes ces années d’inactivité...
La technologie du spectacle a considérablement évolué au service de disciplines artistiques, de même, en constante, métamorphose. Cela ordonne une formation continue aux tenants de cette sphère professionnelle.
En parallèle des rénovations, a-t-on procédé à un recrutement judicieux de postulants, et ouvert une formation hautement spécialisée, pour un encadrement motivant la créativité plurielle mauricienne ?
Qu’il s’agisse du son, des lumières, des effets spéciaux, de la scénographie, des accessoires, de l’imagerie, ou des loges et du foyer des artistes... Le tout dans le respect de cette philosophie immuable d’exigence, d’abnégation, d’inventivité, de compagnonnage, et d’humilité des serviteurs de la scène.
L’équipe administrative, comme celle de l’accueil et des services annexes, doit être habitée par le même tonique esprit d’entreprise. La routine de «fonctionnaires lisses» serait incongrue, et donc à bannir.
Enfin, la clef de voûte d’un théâtre est sa direction artistique. Elle ne se limite pas à administrer une location des lieux.
Au-delà de son profil architectural, avec pugnacité et pertinence, elle œuvre à lui forger une véritable identité, grâce à une programmation mensuelle éclectique et attractive. Épaulé en cela, par une intense communication multimédias, charpentée et fédératrice. Fidéliser la fréquentation d’un théâtre, c’est placer le spectateur en demande permanente, et non juste le border dans ses habitudes. Avec d’autres, la trajectoire du Caudan Art Centre et du festival Mama Jazz illustre, notablement, le bien-fondé de ces principes.
Forte de la mutation amorcée par la nouvelle législature, l’île Maurice se doit aussi de satisfaire à l’appétence de toutes ses communautés et générations confondues, pour une vie culturelle généreuse et digne, vecteur d’émotions, d’harmonie et de bien-être.
PAR PATRICK PONTGAHET
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