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Gouvernement vs MFA : pourquoi le football mauricien est dans l’oeil du cyclone

Le gouvernement a remporté une première bataille dans cette guerre qui ne fait que commencer.

Le football mauricien est désormais au centre d’une tempête après la décision du gouvernement, via le ministère des Sports, de dissoudre le comité directeur de la MFA. Cela est le résultat d’une série de mauvaises gestions alors que sur le terrain les résultats n’ont pas suivi.

Le 2 mars 2023 restera une date mémorable pour le football mauricien. A défaut d’une grande victoire sur un rectangle vert, c’est sur un autre terrain que cela s’est passé. On savait qu’un match opposant le gouvernement à la Mauritius Football Association (MFA) avait débuté depuis quelque temps en coulisses avec quelques échauffements à travers des déclarations fracassantes en guise de «mind games».

 

Le coup d’envoi de ce match a été donné durant la semaine écoulée avec une première manche en faveur du gouvernement qui a procédé à la dissolution de l’actuel comité directeur de la MFA et le remplacer par un comité temporaire présidé par Jean-Pierre Sauzier.

 

L’instance fédérale a, alors, logé une injonction, vendredi, en Cour suprême et a alerté la FIFA et la CAF. Donc, on s'attend à ce que le gouvernement livre sa version en cour de justice cette semaine.

 

Cette dissolution est justifiée parce que la MFA n’est pas en conformité avec le Sports Act 2016 malgré les rappels lancés depuis quelque temps mais sans suite. Outre le Sports Act 2016, les nombreux scandales qui ont émergé de Trianon, siège de la MFA, ont aussi contribué à cette intervention du MAJSL à l’instar des sanctions de la Fifa dans le cadre des certificats de transferts de joueurs non conformes ou encore l’annulation des championnats malgré le soutien du MAJSL. 

 

Ajouter à cela, les résultats sportifs ne suivent pas malgré les gros moyens dont dispose la plus ancienne fédération sportive du pays. Un fait que n’a pas manqué de souligner le ministre de l'Autonomisation de la jeunesse, des sports et des Loisirs, Stephan Toussaint, lors de l'annonce de cette mesure jeudi matin.

 

Dans la foulée un comité temporaire (voir plus loin), présidé par Jean-Pierre Sauzier, a été mis sur pied alors que la saison 2022/23 ne sera pas interrompue et se déroulera dans les stades gérés par le MSC.

 

Réactions

 

Devanand Ritoo (ex-ministre des Sports et ancien footballeur-entraîneur) : «Une solution dans la concertation doit être trouvée»

 

Il connaît les rouages pour avoir été footballeur, entraîneur, formateur, et ministre des Sports. Bien évidemment, le match gouvernement vs MFA l’interpelle. «La MFA, le ministère, la FIFA de même que le Comité olympique mauricien (COM) doivent se concerter pour trouver une solution. Si le ministère a dissous le comité directeur de la MFA, c’est qu’on a franchi un cap où il n’y a aucun effort qui est fait pour remédier à la situation. La fédération ne peut pas non plus agir comme si elle n’avait que faire du ministère. Si la FIFA décide de suspendre Maurice, nous ne pourrons non plus participer aux événements footballistiques, même pas les Jeux des îles et c’est le football qui va en faire les frais», commente Devanand Ritoo.

 

Il avance que le football ne peut pas se contenter uniquement des rencontres régionales et nationales. «Notre football est au plus bas, et, malgré tout, les gens aiment ce sport, nous l’avons vu durant les JIOI. Il est important de faire avancer les choses ensemble. Pas de compétitions, pas de progrès et l’impact se fait aussitôt ressentir sur les prestations de l’équipe nationale. D’où la nécessité de sortir de cette crise. La fédération a besoin de régler ses problèmes et le ministère de continuer à jouer son rôle de facilitateur. Les JIOI ne sont pas loin, le temps nous est compté», angoisse l’ex-vedette du football local.

 

Il souligne que de bonnes relations ont toujours prévalu entre la MFA et le ministère, mais regrette que ce ne soit plus le cas maintenant. «La MFA existe depuis pas mal d’année et autant que je m’en souvienne, elle a toujours eu une entente cordiale avec le ministère mais ce n’est plus le cas, il y a des gens qui sont obstinés et qui pensent qu’ils sont au-dessus de tout à la fédération. Le ministère à un code à respecter, il ne peut pas non plus cautionner une instance qui fait fi des lois du pays alors que les autres respectent ces règlements. Que se passerait-il si les autres instances font pareil», se demande l’ex-ministre.  

 

Il rappelle que le rôle du ministère est de travailler avec toutes les fédérations sportives. Des instances reconnues en premier lieu par leur fédération internationale puis par le gouvernement à travers son ministère des sports.  La reconnaissance internationale permet aux fédérations locales de bénéficier d’aides sous différentes formes à savoir financières et techniques pour pouvoir se développer. Le ministère accorde lui aussi son soutien financier, infrastructurel, technique et logistique en mettant en place des centres de préformation et de formation, du matériel sportif et des directeurs techniques nationaux.

 

«Le football est notre sport roi, la discipline la plus populaire dans le pays. Quand le ministère procède aux dotations budgétaires des fédérations, l’exercice se fait en prenant en compte la popularité et la performance de chaque discipline. En plus de ce budget, la MFA reçoit également des soutiens financiers de la FIFA qui est l’instance sportive la plus riche de la planète. Ce n’est pas à nous d’interférer dans ce que l’instance local reçoit de sa fédération internationale. Si malgré tout ce financement, il n’y a pas de progrès. Il y a un desk officer au ministère qui s’occupe de chaque fédération. Son rôle est de traiter les dossiers des fédérations sous sa responsabilité et de tenir le ministre au courant de la situation dans chaque discipline. Si une fédération progresse, la meilleure indication reste les performances sportives», soutient notre interlocuteur.

 

Il avance que le ministère ne peut s’occuper de l’organisation des compétitions de toutes les disciplines dans le pays qui sont plus d’une quarantaine. D’où le besoin pour toutes les parties concernées de travailler ensemble pour l’avènement du football et du sport mauricien.

 

Franco Quirin (responsable de la Commission des Sports au MMM) : «Trop de mauvais résultats»

 

La gestion de la MFA a fait l’objet de plusieurs questions au Parlement au cours de ces dernières années. C’est le député Franco Quirin, qui s’occupe du dossier des Sports au MMM, qui a été au premier plan quand il s’agit d’interpeller le ministre concerné sur le football mauricien. Il accueille favorablement la démarche du gouvernement de mettre de l’ordre dans cette discipline.

 

«J’aurais pris une telle décision depuis bien longtemps même si cela ne fait pas plaisir, mais il faut donner un renouveau au football mauricien avec une équipe plus compétente. Cela fait des années et des années qu’on assiste à une situation où une fédération fait la pluie et le beau temps sans produire de bons résultats. Il y a le non respect de la loi du pays mais aussi une accumulation des cas de mauvaises gestions et des mauvais résultats», souligne l'élu mauve.

 

«On ne pouvait pas laisser perdurer une telle situation, et je souhaite que l’on puisse mettre de l’ordre le plus rapidement possible. Plusieurs fois, j'en ai fait la demande auprès du ministre des Sports, au Parlement, et finalement il agit. C’est un risque que nous prenons pour le football mauricien et la FIFA ne peut pas dire qu’elle n’est pas au courant comment sont gérées les affaires footballistique à Maurice. Rien de personnel contre Samir Sobha et son équipe mais ils n’ont pas été à la hauteur».

 

Franco Quirin lance un appel aux dirigeants. «Les clubs qui ont le droit de vote doivent assumer leurs responsabilités. Les dirigeants ne doivent pas se laisser berner par des avantages personnels pour devenir redevables envers certaines personnes au détriment du développement du football. L’avenir du football mauricien passe par les clubs. Il faut un renouveau et que le sport roi retrouve ses lettres de noblesse et offre un avenir aux jeunes.»

 

Jonathan Bru (ex-membre du Club M et DTN) souhaite une issue favorable

 

Bien qu’occupant de grandes responsabilités comme coach de l'équipe du Red Star FC en France, Jonathan Bru continue de jeter un regard sur ce qui se passe à Maurice. L’ex-international du Club M, puis DTN, est attristé par les derniers événements qui secouent le football mauricien.

 

«Je suis affecté par ces épisodes hasardeux qui ternissent l'image de notre pays et notre football. J’ai la chance d’exercer tous les jours le métier d'entraîneur de football et je souhaite que tous les Mauriciens fans de football puissent, eux aussi, vivre pleinement leur passion. J'espère que les circonstances actuelles trouveront une issue favorable pour toutes les parties prenantes», confie Jonathan Bru.

 

Catastrophique !

 

Cette année, cela fait dix ans que Samir Sobha est président de la MFA après avoir été membre du comité exécutif sous la présidence de Vinod Persunoo. Malgré un temps de grâce et des belles paroles, il n’a pu redorer le blason du football mauricien avec deux JIOI perdus (l’objectif suprême pour notre sport roi alors que nos voisins malgaches et comoriens participent à la phase finale de la CAN) sans oublier une série de défaites du Club M dans diverses compétitions africaines.

 

Pas étonnant que les stades restent vides durant le championnat et que Maurice occupe une modeste 180e place au classement de la FIFA alors qu’en football féminin on est bien ancrés à la dernière. La situation n'est guère reluisante au niveau des jeunes malgré quelques embellies sans lendemain. De plus, on assiste à un défilé des entraîneurs dans toutes les catégories de même qu’au poste de DTN.

 

Au fait, le mandat de Samir Sobha est plus marqué par des scandales que par des bons résultats. La liste est longue avec l’affaire de voyeurisme dans les toilettes des femmes à la MFA, le recrutement frauduleux des footballeurs étrangers qui a été sanctionné par la FIFA, deux maillots différents portés par Maurice dans un match officiel au Népal, l'arrêt du football professionnel, la participation rocambolesque de Maurice à la CAN de Futsal au Maroc qui a valu à Maurice une suspension et amende, l’annulation de la participation de Maurice à la Madewis Cup, l’annulation de deux saisons de football à cause du Covid, le retrait de la MFA dans l’organisation des Jeux de la CJSOI en décembre dernier et des voyages offerts à La Mecque aux présidents des fédérations par l’ex-président de la CAF, Ahmad Ahmad, qui a valu à celui-ci une suspension dans ce qui s’apparente à une affaire de corruption.

 

La MFA réagit sur Facebook

 

Aucune réaction officielle, à défaut d’un communiqué de presse, de la part de la MFA après le couperet du gouvernement. C’est après plus de 24 heures qu’elle a posté sur sa page Facebook (sur laquelle elle a banni ses détracteurs, y compris des membres de la presse), qu’elle a informé la FIFA et la CAF de la décision du gouvernement.

 

Le rôle du comité temporaire

 

Le ministre Toussaint a précisé que le mandat spécifique de la Commission temporaire est de  gérer les affaires courantes de la Fédération, modifier les règles de la MFA en vue de les aligner sur les dispositions de la loi sur le sport de 2016, organiser et superviser les élections aux niveaux régional et national dans un délai de trois mois. Un comité technique mis en place sous la supervision de Sarjoo Gowreesunkur, ancien entraîneur de l'équipe nationale de football de Maurice et ancien footballeur reconnu, aura pour tâche d'organiser des compétitions locales et  de poursuivre la préparation du Club M aux grands rendez-vous internationaux.

 

Suspension FIFA : possiblement après le 16 mars ?

 

Après la dissolution du comité exécutif de la MFA par le gouvernement, Maurice sera suspendue par la FIFA dans les jours à venir, car l’instance mondiale considère cela comme une ingérence. Selon une source bien placée, cela pourrait survenir après la tenue du congrès de la FIFA prévue le 16 mars au Rwanda, «la FIFA a besoin du vote de Maurice», ajoute cyniquement notre interlocuteur.

 

Cela veut dire que Maurice ne pourra pas participer à des compétitions internationales, la MFA ne va pas recevoir l'argent de la FIFA et pas de voyage pour les dirigeants. De toute façon, les diverses sélections ont l'habitude de faire des apparitions éclairs dans les tournois et restent au garage pendant de long mois.

 

Cette suspension ne peut durer que quelques mois ou quelques années le temps qu'une solution soit trouvée pour remettre le football mauricien sur des rails. Plusieurs pays ont été mis sur la touche par la FIFA ces dernières années.

 

En fait, la FIFA lâche rarement ses pays membres, et, en plus, en pleine campagne pour l'élection de son président, dont le titulaire Gianni Infantino voudrait un autre mandat.

 

Aucune incidence sur l'académie de Liverpool

 

Le ministre Toussaint a tenu à démentir des rumeurs que le Liverpool FC International Academy Mauritius pourrait fermer ses portes si Maurice est suspendue par la FIFA. «Je tiens à souligner que si elle nous suspend, cela n’aura aucune incidence sur l’académie de Liverpool qui va continuer ses activités de formations avec les jeunes. Nous avons déjà parlé avec la direction de l’Académie qui a expliqué qu’elle est gérée de manière indépendante. Je dénonce d’ailleurs les tentatives de la MFA qui voulait faire croire aux parents des pensionnaires de l’Académie que le centre allait arrêter ses activités en cas de suspension. Cela montre comment certains peuvent mentir et faire peur».

 

Textes: Rehade Jhuboo et Qadeer Hoybun