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19 mai 2024 14:06
La Cité EDC, à Caroline est très animée comme à l’accoutumée. Plusieurs habitants de cette localité sont dans les rues pour profiter des rayons du soleil qui brillent sur cette région de l’Est en ce jeudi après-midi. Des enfants en profitent pour jouer au ballon dans les ruelles malgré la petite brise qui fait frissonner, sous l’œil attentif de certains adultes qui sont regroupés dans des endroits stratégiques pour commenter la nouvelle du jour dans l’endroit : le verdict condamnant Kenny Cader, «enn zanfan landrwa», à 29 ans de prison pour le meurtre de la petite Aliya. La mère de l’enfant, Anaëlle Pierre, et son père, Maxwell Edouard, sont également deux habitants de la localité. Aliya n’avait que 14 mois lorsque Kenny Cader l’a étranglée parce qu’elle n’arrêtait pas, avait-t-il déclaré ensuite, de pleurer pendant qu’il dormait.
Dans le cadre de son procès, Kenny Cader avait plaidé coupable. Il avait également présenté des excuses en cour pour son acte horrible, en précisant qu’il se droguait à l’époque. Le verdict le condamnant à 29 ans de prison est tombé le 15 mai. Le juge Pravin Harrah a bien souligné la gravité du délit et a vivement critiqué le comportement indigne de l’accusé qui avait, dit-il, le devoir et la responsabilité de protéger la victime. «If children are not safe in their cocoon and suffer atrocity in their own house by a person responsible for their safety, we have some serious concerns», a déclaré le juge Harrah. La poursuite était représentée par Me Audrey Stephen, Principal State Counsel.
Anaëlle Pierre a appris la condamnation de son ancien compagnon de la bouche de sa mère et de sa tante. «Zordi gramatin (NdlR : le jeudi 16 mai) ki mo mama ek enn matant inn anons mwa sa nouvel-la. Mo ti panse Kenny pou kondane plis. Li merit boukou plis ki sa. Sa verdik-la enn sirpriz pou mwa», s’étonne la jeune femme de 24 ans, qui ne s’est toujours pas remise de la mort de son enfant. Si elle était toujours en vie, la petite Aliya aurait fêté ses 5 ans le 19 mars dernier. «Mo pans mo zanfan toulezour. Mo larm koul tousel lerla. Li pa ti merit enn lamor koumsa», confie Anaëlle Pierre, le coeur gros de chagrin. Son père Jimmy, chez qui est retournée vivre depuis le décès de sa fille, confirme ses dires : «Ena fwa aswar ou trouv li pe marse, plore ek koz tousel dan lakaz ek foto so tifi dan so lame. Lamor Aliya ankor touzour difisil pou aksepte. Enn soufrans terib pou nou tou dan fami.»
Aliya était le troisième enfant d’Anaëlle. Son père Maxwell Edouard est actuellement en prison. Il avait été arrêté en 2020 suivant l’agression mortelle d’une salesgirl de 44 ans dans une quincaillerie à Bel-Air ; un crime commis avec son complice Donovan Ravaton. Drôle de coïncidence : la fillette est décédée un an jour pour jour après l’arrestation de son père. «Mo pa gagn nouvel papa Aliya ditou», précise la jeune femme qui a une fille de 10 ans et un fils de 9 ans avec son compagnon précédent. Il y a un an, elle est devenue la maman d’un autre fils né d’une autre relation.
Quoi qu’il en soit, le décès tragique de sa petite Aliya a laissé en elle un vide qui ne pourra jamais être comblé. Le soir du drame, Anaëlle dormait à poing fermé et assure n’avoir rien entendu : «Mo ti pe dormi kan Kenny inn trangle mo tifi. Li ousi linn dir mem zafer la polis.» La jeune femme a tout de même été auditionnée à titre de témoin dans cette affaire. «Mo ti al lakour pou depoze le 28 mars. Bann-la ti lir mo depozision apre inn dimann mwa si tou seki monn dir ladan vre. Monn dir zot wi», souligne la jeune femme pour qui ce moment a été très dur à vivre.
Revoir l’assassin de sa fille n’a fait que rendre les choses encore plus difficiles. «Monn gagn extra ner sa zour-la kan monn trouv li dan box akize. Mo ti panse bann-la pa pou les mwa trouv li. So bann fami ti menas mwa zour mo ti al lakour-la. Zot ti deza dir mwa tir case. So avoka ti dimann mwa ousi si mo dakor pou pardonn li. Ziz ek avoka la pourswit ti obzekte. Li difisil pou pardonn li. Enn so bann pros ti demann mwa pardon apre pou bann menas ki so fami ti fer mwa. Linn dir mwa ki li inposib fer sa, ki li ousi li enn mama ek li pa krwar ki li ti pou kapav pardonn enn dimoun kinn touy so zanfan. Linn presize ki li konpran mo soufrans», souligne Anaëlle. Elle n’a pas signalé l’affaire des menaces à la police, dit-elle, car les proches de son ancien compagnon se sont ensuite calmés.
C’est dans la soirée du 31 mai au 1er juin 2021 que la petite Aliya a été mortellement étranglée par Kenny Cader. Le drame s’est joué à Trou-d’Eau-Douce, dans la pièce en tôle où Kenny Cader et Anaëlle Pierre s’étaient installés chez un couple qui les hébergeait depuis novembre 2020 sur une base humanitaire. Anaëlle avait fait la connaissance de Kenny huit mois plus tôt alors que Maxwell, le père d’Aliya, était en prison pour assassinat. Personne ne sait à ce jour où Kenny travaillait. Selon le voisinage, il quittait la maison tous les jours à 6h45 et rentrait à 20h30. À l’époque toujours, Anaëlle disait qu’elle voulait décrocher de son addiction à la drogue. Elle aussi avait déjà eu des démêlés avec la justice pour un délit de drogue.
Quelques jours avant son décès, Aliya avait été emmenée au dispensaire de Trou-d’Eau-Douce car elle souffrait de problèmes respiratoires. Le médecin de service lui avait alors prescrit du sirop et des gouttes pour le nez. La fillette avait, par la suite, passé le week-end du 29 au 30 mai 2021 au domicile de son arrière-grand-mère maternelle à Olivia, en compagnie de sa mère. Les deux étaient sont rentrées à Trou-d’Eau-Douce en début de soirée le 31 mai. Mais quelques heures plus tard, c’était le drame. Kenny a étranglé la fillette parce qu’elle pleurait trop pendant qu’il dormait.
La police a procédé à l’arrestation de Kenny Cader dans les heures qui ont suivi cette agression. Le jeune homme était déjà fiché comme récidiviste notoire. Il a plusieurs délits de drogue à son actif. Sa condamnation aux Assises n’apaise, hélas, nullement la douleur d’Anaëlle. «Mo gran perdan dan sa zistwar-la parski monn perdi mo zanfan», se lamente la jeune maman, la voix nouée par le chagrin.
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