La question est sur toutes les lèvres : le Muvman Liberater (ML) serait-il au bord de l’implosion ? Dans le milieu politique, les rumeurs enflent ! Des bruits de couloirs attestent ainsi qu’on se dirigerait vers une nouvelle configuration à l’Assemblée nationale.
L’élément déclencheur de ce nouveau séisme politique : l’affaire Vijaya Sumputh ou plutôt les révélations du ministre de la Santé, Anwar Husnoo, au Parlement, au sujet du salaire de Rs 323 200 perçu par l’ex-directrice du Trust Fund for Specialised Medical Care Cardiac Centre. Et malgré la démission de Vijaya Sumputh dans le sillage de la polémique, et la révocation vendredi du board du centre cardiaque, les choses sont bien loin de s’estomper sur le plan politique.
Cette affaire a toutefois grandement «choqué» et «embarrasé» le gouvernement, et particulièrement le Premier ministre, Pravind Jugnauth. Il semblerait ainsi que le MSM tenterait de pousser le ML vers la porte de sortie mais pas sans s’être assuré de la fidélité de quelques membres du parti d’Ivan Collendavelloo. Sollicité pour une réaction, Pradeep Roopun, le ministre des Arts et de la culture, a démenti qu’il y aurait une tension au sein du gouvernement. «C’est totalement faux. Il n’y a pas de problème entre les partenaires de l’alliance. Le Premier ministre a d’ailleurs déjà souligné cela», nous a-t-il déclaré.
D’une conséquence à une autre, le cas Sumputh aurait aussi ébranlé la cohésion au sein du ML. Car entre le ministre Anwar Husnoo et Vijaya Sumputh, tous deux du ML, il semblerait que plus rien ne va. Leurs versions s’opposent concernant les procédures autour du paiement du salaire de la discorde (voir hors-texte plus loin).
Interrogé sur l’éventualité d’une séparatation entre le ML et le MSM, Tulsiraj Benydin, membre du ML, soutient qu’il n’y a aucun problème avec le parti soleil. «Il n’y a pas de conflit, ni de friction à l’ordre du jour. On travaille ensemble et cela dans l’intérêt du pays. C’est business as usual», nous-a-t-il déclaré.
Au cœur de ce séisme politique, Vijaya Sumputh dit «regretter» que le ministre Husnoo n’ait pas eu le courage de lui parler concernant les interrogations autour de son salaire alors qu’ils sont du même parti. «Vous devinez bien mon état d’esprit par rapport à ma situation», nous a déclaré Vijaya Sumputh lorsque nous l’avons sollicitée pour une réaction par rapport à son avenir suivant sa démission. «J’ai dit tout ce que je devais dire. Je suis fatiguée et je vais réfléchir à tête reposée», nous a répondu celle qui est connue pour ne pas avoir généralement sa langue dans sa poche.
Polémique
Avec cette dernière polémique, il se chuchote que deux camps s’affronteraient au sein du ML et que quelques membres seraient prêts à cross the floor pour rejoindre le MSM. Interrogé sur cette rumeur, Sangeet Fowdar, député de la circonscription no. 6 et membre du ML, nous a fait la déclaration suivante : «Je n’ai rien entendu as such. Si une telle chose était sur le point d’arriver, je l’aurais su !»
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas la première fois que Vijaya Sumputh se retrouve sous le feu des projecteurs. Sa nomination à la tête du Cardiac Centreen 2015 avait fait l’objet d’une enquête devant l’Equal Opportunities Commission. Celle qui a rejoint le MSM en 1998 avait aussi occupé l’actualité en décembre 2005 quand elle s’était fait expulser du MSM lors d’un bureau politiquespécial. Elle avait été
accusée d’avoir commenté des scandales impliquant des membres de la direction
de ce parti.
À l’époque, Anil Gayan se faisait aussi expulser du MSM. On lui reprochait alors d’avoir prêté son bureau d’avocat à Vijaya Sumputh et de l’avoir défendue. «Il n’a fait que maintenir la position qu’il avait prise selon ses principes. Il aurait fait la même chose pour n’importe qui d’autre. Il faut préciser qu’il n’est pas le seul à avoir pris mon parti»,soulignait Vijaya dans un entretien à 5-Plus en 2005.
Cette fois encore, Anil Gayan, actuel ministre du Tourisme, n’a pas manqué de voler à son secours. Selon lui, son collègue Anwar Husnoo, qui est aussi du ML, a manqué d’honnêteté dans sa réponse fournie au Parlement mardi. Le ministre Gayan affirme l’avoir très mal vécu, d’autant plus que, avance-t-il, il était convenu que le ministre de la Santé n’allait pas donner cette réponse, du moins pas sous cette forme.
Décrite comme une «personne qui n’a pas froid aux yeux», Vijaya Sumputh, qui n’a jamais caché «avoir la politique dans le sang», est aussi connue comme une «fonceuse». L’avocate, native de Curepipe, qui a fait ses débuts de politicienne dans les rangs du MSM, vouait dans sa jeunesse un culte à sir Anerood Jugnauth. Après ses études secondaires au collège Lorette de Quatre-Bornes, elle a mis le cap sur l’Angleterre pour poursuivre des études de droit. Détentrice d’un Master’s et d’un Post-Graduate in Legal Practice, et forte d’une d’expérience de travail de deux ans, elle est rentrée à Maurice en 1998.
C’est peu après son retour qu’elle a rejoint le parti soleil. «Le MSM représentait des principes auxquels j’adhérais complètement», confiait-elle à 5-Plus à l’époque. Elle enchaîne alors avec le travail sur le terrain : municipales en 2001, élection partielle au no. 7 en 2003 et accède en 2004 au poste de directrice de la Tourism Authority alors qu’Anil Gayan est ministre
du Tourisme.
Il y a deux ans, elle rejoint le Muvman Liberater et en février 2015, elle prend la tête du Trust Fund for Specialised Medical Care avant de se retrouver deux ans plus tard au cœur d’un séisme politique.
Le MSM peut-il gouverner seul ?
Et si le ML quittait le gouvernement…. Après le départ du PMSD de l’alliance gouvernementale et avec les rumeurs que le MSM va se séparer du ML, notamment après la polémique entourant le salaire de Vijaya Sumputh à la tête du Trust Fund for Specialised Medical Care Cardiac Centre, entre autres sources de conflits (notamment l’affaire Alvaro Sobrinho), la question de savoir si le MSM peut gourverner seul se pose. Face à cette éventualité, Dharam Gokhool, ancien ministre de l’Éducation et observateur de l’échiquier politique, pense que c’est tout à fait possible : «Je pense que le MSM peut compter sur quelques membres du ML. Je citerais là Sangeet Fowdar, Eddy Boissézon et Tulsiraj Benydin qui, selon moi, pourraient rester au sein du gouvernement. Le MSM aura alors une bonne majorité, ce qui fait que le parti pourrait tout à fait gouverner seul…»
Le salaire de la discorde
La directrice du Trust Fund for Specialised Medical Care touchait initialement Rs 200 200 en mars 2015. Elle a eu droit à une augmentation de Rs 15 000, sans le feu vert du Senior Chief Executive du ministère. Le ministre de la Santé, Anwar Husnoo, a dit qu’il y a eu une réunion spéciale du conseil d’administration du Trust Fund for Specialised Medical Care le 18 janvier. Selon lui, les membres du comité ont considéré qu’avec les économies qui seraient réalisées avec la démission d’un chirurgien qui percevait un salaire mensuel de Rs 300 000, une allocation de Rs 100 000 serait alors versée à Vijaya Sumputh.
Anwar Husnoo a déclaré qu’il avait été consulté avant une autre réunion du conseil d’administration, qui allait se tenir le 25 janvier, pour décider du contrat de Vijaya Sumputh. «J’ai approuvé le renouvellement du contrat sur les conditions existantes et je n’ai pas approuvé une allocation additionnelle de Rs 100 000.» Le ministre a souligné avoir consulté le Premier ministre à ce sujet et il a précisé que Pravind Jugnauth était d’accord avec lui. Anwar Husnoo a aussi dit que ce n’est que lundi qu’il a appris qu’un nouveau contrat de deux ans avait déjà été offert à Vijaya Sumputh le 25 janvier, incluant une allocation de Rs 100 000.
Paul Bérenger compile un dossier sur les nominations scandaleuses
Bérenger fustige. Lors de la conférence de presse du MMM, le leader des Mauves a dit qu’il compile actuellement un dossier sur des nominations scandaleuses, qu’il rendra public prochainement. Paul Bérenger affirme que l’enquête menée par Lutchmeeparsad Aujayeb sur les fameuses allocations de Vijaya Sumputh «ne servira à rien». Pour lui, c’est un criminal case et c’est à l’ICAC et à la police d’enquêter. Paul Bérenger a aussi condamné le langage récent de sir Anerood Jugnauth. «Il a tenu des propos hargneux et il vient en plus blâmer la presse alors qu’il aurait dû s’excuser.»