Tout change, sauf au Parlement !

La voix du peuple, dites-vous ? Quel gag ! Pendant que tout le monde repense à son fonctionnement, pendant que chacun d’entre nous essaie de s’adapter graduellement à ce new normal qu’impose le Covid-19, les locataires de l’Assemblée nationale continuent tranquillement à livrer combat sur le champ de l’ego. Comme s’ils vivaient en autarcie et que rien n’avait changé dans leur petit monde rythmé par le rapport des forces.

Les citoyens ont donc attendu plus de six longues semaines pour une reprise de l’Assemblée nationale avec, comme résultat, la séance d’un petit combat de coqs, certains ayant décidé de jouer à qui aura le dernier mot ! C’est ainsi que la reprise du Parlement avait un air décevant de déjà-vu, mardi dernier, illustrant le sens des priorités de ceux qui s’y trouvaient.

L’un de nos protagonistes, et pas des moindres (Bérenger), a donc traité le speaker Phokeer de mal élevé et ce dernier a, lui, décidé d’expulser le chef des Mauves avec le dénouement que l’on connaît : le walk-out de tous les membres de l’opposition.

Qui du leader du MMM ou du speaker avait raison ou tort n’est pas la question, tant c’est futile et surréaliste. En ce temps difficile d’un réapprentissage d’une nouvelle vie, n’avons-nous pas droit à un certain discernement, voire de bon sens de la part de ces habitués de l’Assemblée nationale ? En quoi est-ce que ces échanges infantilisants, suivis d’une expulsion d’un leader de parti et d’un départ collectif des députés de l’opposition, ont-ils fait avancer les débats tant attendus et nécessaires après cette longue fermeture du Parlement ? Est-ce trop demander que tous, élus de différents bords et speaker – dont on a pu mesurer la finesse dès son installation – mettent de côté la petitesse d’esprit à un moment si délicat de notre histoire ?

Pour une fois que tout ce beau monde était de sortie, ne pouvaient-ils prendre de la hauteur eu égard au sérieux de la situation ? Comprennent-ils à quel point leur petite ridicule guéguerre est déplacée, ne serait-ce qu’en pensant à nos frontliners qui se battent sans relâche, ne faisant aucun walk-out, quitte à parfois y laisser la vie, à l’exemple du Dr Cheong, décédé après avoir été contaminé par un patient ?

Les locataires de l’Assemblée nationale réalisent-ils qu’avec un peu de bonne volonté de part et d’autre, ils auraient pu faire l’économie de la scène pathétique à laquelle nous avons été forcés d’assister, à l’insu de notre plein gré ?

Peut-on espérer, en marge des prochaines séances, que tous se ressaisissent, prennent pleinement conscience de leur rôle et assument leur responsabilité ? Pourrait-on attendre, de la part des membres de l’opposition, s’ils veulent réellement parler d’une seule voix – qu’ils mettent ensemble leur énergie pour réclamer des comptes de ce gouvernement qui ne semble ni avoir de plan large ni de réponses satisfaisantes face aux multiples interrogations des citoyens ?

À quelques jours de la présentation du Covid Bill, dont nous connaissons les bribes pour ce qui a été dit lors d’une émission spéciale la semaine dernière, peut-on espérer que certaines propositions du public, allant de l’économie à l’éducation, en passant par tant d’autres secteurs, soient prises en compte ?  Qu’on le sache : cette loi viendra régir plusieurs aspects de nos vies. La moindre des choses est de permettre aux citoyens de participer aux débats et non d’imposer une loi décidée en haut lieu, par ceux qui pensent à tort détenir la somme de tous les savoirs. Est-ce que la voix du peuple sera cette fois entendue ?