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13 septembre 2025 13:22
On l’appelle le «cyber-apôtre» ou le «geek de Dieu», notamment pour ses talents en informatique qu’il mettait à profit pour parler du Christ. Celui qui était habité d’une foi précoce et brûlante, au point de se rendre à la messe tous les jours, a été canonisé le dimanche 7 septembre. Le Mauricien Rajesh Mohur, qui a été le baby-sitter du «Saint 2.0», qui est décédé à l’âge de 15 ans, raconte comment il a vécu ce moment fort sur l’estrade officielle à côté de la famille de Carlo Acutis sur la place Saint-Pierre, à Rome.
Un visage rayonnant de tendresse. Des yeux remplis d’amour et d’affection. C’est l’image d’une maman qui assiste à la cérémonie de canonisation de son enfant, cette reconnaissance officielle de la sainteté d’une personne et de son modèle de vie qui permet aux fidèles de la vénérer et de la prier comme un saint. Le cliché de cette mère qui voit son fils accéder à ce statut divin a fait le tour du monde. Un saint est considéré dans l’Église comme un modèle inspirant pour les personnes qui cherchent à vivre une vie de foi et de service. Connus pour avoir accompli des miracles, tels que des guérisons, durant leur vie ou après leur mort, ou encore pour avoir annoncé des prophécies, les saints sont souvent invoqués pour leur intercession et leur protection.
En tout cas, il est très rare que des parents puissent assister à la cérémonie de canonisation de l’un de leurs enfants. Mais cela a été le cas pour Antonia Salzano, la mère de Carlo Acutis, qui, ce jour-là, était entourée de son mari et ses autres enfants, Michele et Francesca, qui étaient eux aussi aux premières loges de ce grand événement pour leur famille. C’est donc ce dimanche 7 septembre, à la place Saint-Pierre au Vatican, à Rome, qu’Antonia Salzano et sa famille, en communion avec des milliers de personnes, en Italie et dans le monde, a assisté à la messe durant laquelle son fils Carlo Acutis – qui avait 15 ans à son décès – a rejoint la liste très sélective des religieux canonisés par l’Église catholique, devenant ainsi le premier millénial à être fait saint, lors d’une cérémonie présidée par le pape Léon XIV.
C’est le pape François qui avait pris la décision d’élever au rang de saint cet adolescent ayant voué ses talents à faire d’Internet un espace d’évangélisation ; une façon pour l’Église de tendre la main à la jeunesse. Carlo était un passionné d’informatique et a utilisé ses compétences pour créer des sites internet, notamment pour sa paroisse et son lycée. Son œuvre la plus notable est une exposition itinérante et en ligne recensant les miracles eucharistiques à travers le monde. Cette utilisation de la technologie pour partager l’Évangile lui a valu le surnom de «saint des geeks», de «cyber-apôtre» ou encore de «geek de Dieu».
Pas très loin d’Antonia Salzano, sur l’estrade officielle à la place Saint-Pierre, Rajesh Mohur, un autre proche de Carlo Acutis, a aussi assisté à ce «moment béni» avec de la fierté dans le cœur. En vivant cette nouvelle étape aux côtés des parents de Carlo Acutis, notre compatriote, originaire de Vacoas, a vu défiler dans sa mémoire tout ce qu’il a partagé avec son petit protégé ; celui sur qui il a veillé en tant que nounou après qu’il a quitté Maurice pour mettre le cap sur l’Italie, son pays d’adoption. Il a ainsi eu l'occasion, dit-il, de vivre de magnifiques expériences grâce à Carlo Acutis.
«Beaucoup de personnes avaient postulé – surtout des jeunes filles – mais moi, sans aucune expérience comme nounou, j’ai eu ce pressentiment que c’était ma place. Dès que j’ai sonné à leur porte, Carlo s’est précipité vers moi et a agrippé ma jambe. Ses parents étaient surpris. Il leur a dit : “Il est mon sucre.” À partir de là, j’ai commencé à m’occuper de lui, à l’emmener à l’école… Je l’ai accompagné dans sa vie», raconte Rajesh, qui, dimanche dernier, n’a pu s’empêcher de repenser à toutes les étapes de sa vie aux côtés du jeune Italien né le 3 mai 1991 et ayant vécu une vie ordinaire d’adolescent tout en étant profondément ancré dans sa foi catholique.

Pour lui, Carlo était un ado simple qui aimait les animaux et passait beaucoup de temps avec ses amis. Malgré son jeune âge, Carlo manifestait une piété précoce, récitant quotidiennement le chapelet dès l’âge de 4 ans et demi et participant chaque jour à la messe. Ayant vu et assisté à des signes très forts liés à sa foi, du vivant de son petit protégé, Rajesh Mohur a toujours su que celui-ci n’était pas un enfant comme les autres : «Depuis toujours, durant toute son enfance, Carlo a eu de la sympathie pour les personnes en difficulté, comme les pauvres. À l’école, il aidait beaucoup ceux qui avaient, par exemple, un peu de retard. Il était très brillant dans ses études et très à l’écoute de ses amis qui passaient par des moments difficiles, comme la séparation de leurs parents. Il les emmenait chez lui et leur apportait un vrai soutien moral. À chaque fois, il offrait une Bible à ceux qu’il aidait. Il aimait aussi beaucoup aller à la messe. Il allait à l’église tous les jours avant d’aller à l’école, et moi, je l’accompagnais. Il se sentait alors dans son élément.»
Suivant sa mort prématurée à l’âge de 15 ans en octobre 2006, due à une leucémie foudroyante, Rajesh Mohur a très vite compris, après la réalisation des premiers miracles attribués à Carlo Acutis, que la vie et l’héritage spirituel de ce petit garçon qu’il avait accompagné allaient inspirer des milliers de personnes à travers le monde. Carlo Acutis est ainsi crédité d’un miracle notable qui a contribué à sa béatification. Un jeune garçon brésilien nommé Mattheus a été guéri d’une grave anomalie de naissance appelée pancréas annulaire après que sa famille et lui ont prié Carlo Acutis pour sa guérison. Mattheus souffrait de graves douleurs abdominales et était incapable de garder de la nourriture dans son estomac. Après avoir touché une image de Carlo Acutis lors d’une messe et avoir exprimé son souhait de guérir, il a commencé à se sentir mieux et a pu manger normalement sans vomir. Les médecins ont été mystifiés par cette guérison soudaine et inexplicable. Ce miracle a été reconnu par le pape François en février 2020, ce qui a conduit à la béatification de Carlo Acutis le 10 octobre 2020. Il était depuis considéré comme bienheureux par l’Église catholique.
**Émotions **

Le deuxième miracle, qui a ouvert la voie à la canonisation de Carlo, a eu lieu en 2022. Il s’agit du cas de Valeria, une étudiante costaricienne de 21 ans, grièvement blessée dans une chute de vélo à Florence le 2 juillet 2022. Son état, selon l’Église, était désespéré. C’est sa mère Liliana qui s’est mise à prier le bienheureux Carlo Acutis. Elle s’était rendue sur sa tombe à Assise, le 8 juillet, et y avait déposé une lettre pour demander la guérison de sa fille. Le miracle est survenu le jour même : Valeria s’est mise à respirer de façon autonome et s’est rétablie en quelques semaines. Ce miracle a été reconnu par le pape François en 2024 et a contribué à la canonisation du jeune Italien.
Pendant toutes les années durant lesquelles il a cheminé aux côtés de Carlo Acutis, Rajesh Mohur a été, raconte-t-il, témoin de la grande foi qui habitait le jeune homme. «Il n'était animé que par une seule chose : faire du bien autour de lui», nous confie Rajesh – qui s’est converti au catholicisme inspiré par le vécu et les enseignements de son petit protégé –, encore très touché par la cérémonie de dimanche dernier. La devise de Carlo, «L’Eucharistie est mon autoroute vers le ciel», reflète, dit-il, la spiritualité profonde de ce petit garçon qui a changé sa vie. «J’ai vécu la messe de canonisation de Carlo avec beaucoup d’émotion. Depuis dimanche, mon cœur est aussi rempli de joie. La place Saint-Pierre était bondée et j’ai vu plusieurs nationalités qui s’étaient rassemblées pour vivre ce grand moment. J’ai aussi eu l’occasion d’échanger avec des Mauriciens qui avaient fait le déplacement et connaissent mon histoire avec saint Carlo Acutis. La canonisation est quelque chose de très fort pour Carlo, pour sa famille, pour le monde, mais aussi pour moi. Je l’ai vu depuis petit se construire. J’ai vu qu’il était spécial et j’ai vite compris qu’il avait une mission à accomplir ; sa béatification puis sa canonisation en font partie», nous déclare notre compatriote qui est également heureux d’avoir permis à Carlo d’en apprendre plus sur l’île Maurice à travers des histoires qu’il lui racontait.
«C’était important pour moi de lui parler de mes origines et d’où je venais. Je l’ai élevé à la mauricienne en lui parlant très souvent de notre culture. Il connaissait les lieux emblématiques de notre île, connaissait la beauté de nos plages et nos paysages, et il adorait aussi les saveurs de notre île, notamment nos épices et ce qui est piquant, car je lui faisais souvent goûter à des mets bien de chez nous. Je lui ai aussi appris à comprendre et à parler le Kreol Morisien, de ses 4 ans jusqu’à ses 15 ans, et c’est pour cela que j’aime dire qu’on peut lui adresser des prières en créole, car il connaît très bien notre langue maternelle», poursuit Rajesh qui dit être content que l’île Maurice fasse partie de l’histoire de celui qui est maintenant un saint.
«Comme première prière au saint Carlo Acutis, je lui ai demandé d’être à l’écoute de tous ceux et celles qui se tournent vers lui. Je demande souvent à Carlo dans mes prières de veiller sur Maurice et de maintenir l’harmonie et la paix dans notre beau pays. Quand je lui fais cette demande, je sais qu’il m’écoute, car il sait bien ce qui fait la beauté de notre île et va aider à maintenir cela. Je sais aussi que dans l’île, il y a beaucoup de fidèles de Carlo à travers la page Facebook "Les amis de Carlo Acutis de l’île Maurice" qui est très active et connaît toute l’histoire du nouveau saint. Quand je suis à Maurice, je ne rate jamais non plus l’occasion de venir partager les liens que j’ai tissés avec Carlo et ce dont j’ai été témoin à l’église Sainte-Odile à Camp-Levieux où il y a une petite communauté qui prie pour Carlo. J’aime mon île et je suis heureux de savoir qu’il y a un saint qui veille sur notre pays.»
Dans ses prières, Rajesh Mohur parle aussi beaucoup des jeunes à Carlo. «Je lui demande souvent d’aider nos jeunes. Il m’a toujours enseigné que tout est possible grâce à la prière et je demande aux Mauriciens, aux jeunes en particulier, de ne pas hésiter à se confier dans leurs prières à ce jeune saint qui aime notre pays et son peuple. À travers l’héritage que laisse Carlo, j’invite également tous les jeunes à s’inspirer de lui et à marcher dans ses pas. Quand il était confronté à la maladie, Carlo disait qu’il n’avait pas peur, car il avait profité de chaque minute de sa vie qu’il avait dédiée à Dieu.»
Le vécu de Carlo Acutis, poursuit Rajesh Mohur, rappelle que les petites actions quotidiennes, comme la prière et l’amour du prochain, peuvent être des chemins vers la sainteté. Aujourd’hui, la dépouille de l'adolescent est exposée à la vénération des fidèles dans l’église Sainte-Marie-Majeure d’Assise en Italie. Sa tombe vitrée, visible tous les jours de l’année et attirant des pèlerins du monde entier, montre un saint simple en survêtements et en baskets, qui est devenu un modèle pour les jeunes générations, rappelant que la sainteté est pour chacun, et que l’on peut utiliser la technologie pour faire le bien.
Notre compatriote Rajesh Mohur, pour sa part, se présente aujourd’hui comme l'exemple de quelqu’un qui a été touché par Carlo Acutis, le saint qui a eu une vie ordinaire mais une foi extraordinaire...
Deux nouveaux canonisés sur la liste des saints

Une cérémonie, des émotions et deux nouveaux saints. La canonisation de Carlo Acutis, emporté à l’âge de 15 ans par une leucémie foudroyante, était initialement prévue le 27 avril, mais avait été reportée en raison de la mort du pape Léon XIV. Ce dimanche 7 septembre, lors de la messe solennelle, qui a débuté à 10 heures à la place Saint-Pierre, le pape Léon XIV a canonisé également un autre jeune Italien, l’étudiant laïc Pier Giorgio Frassati (1901-1925), un passionné d’alpinisme réputé pour son engagement social et spirituel. «Les saints Pier Giorgio Frassati et Carlo Acutis sont une invitation adressée à nous tous, surtout aux jeunes, à ne pas gâcher la vie, mais à l’orienter vers le haut et à en faire un chef-d’œuvre», a dit le pape Léon XIV dans son homélie.
**Les amis mauriciens du saint **
Ils connaissent son histoire et suivent ses enseignements. Une petite communauté de l’église Sainte-Odile, à Camp-Levieux, fait régulièrement des rencontres et des séances de prières en hommage à celui qui est devenu saint le 7 septembre. Que ce soit sur la page Facebook «Les amis de Carlo Acutis de l’île Maurice» ou dans la petite église, la vie de l’adolescent inspire et touche les cœurs.
«J’ai connu l’histoire de Carlo Acutis suite à sa béatification à travers la chaîne KTO. J’ai été vraiment touchée par la vie de ce jeune garçon et j’ai voulu en savoir plus sur lui. J’ai consulté YouTube et j’ai vu un entretien d’un journaliste indien avec Rajesh Mohur, le nounou de Carlo. Son témoignage était touchant et il parlait de Carlo avec beaucoup de tendresse. J’ai pris contact avec lui et, quand j’ai appris qu’il était de l’île Maurice, j’ai été encore plus émerveillée. Dans le but de faire connaître Carlo, qui était à l’époque bienheureux, nous avons créé, en collaboration avec Rajesh, le groupe "Les Amis de Carlo Acutis de l’île Maurice"», nous confie Patricia Bhujoharry, qui gère la page Facebook. «Notre groupe de prière se réunit les samedis, de 6h30 à 8h30, à la salle Béthanie, à l’église Sainte-Odile, à Camp-Levieux. Nous nous réunissons pour un temps de louange et de prière pour demander l’intercession de Carlo», ajoute Patricia Bhujoharry. Elle a même pu faire le déplacement en Italie pour assister à la canonisation de l’adolescent, qui a une place importante dans sa vie.
Marie-France Cola a aussi suivi avec beaucoup d’attention l’actualité autour de la canonisation de Carlo Acutis. «Voilà quelques années qu’on a appris à connaître l’histoire de cet adolescent béni et qu’on chemine dans ses pas. Aujourd’hui, il fait partie de notre vie et c’est un plaisir pour nous de raconter son histoire aux jeunes», nous déclare Marie-France en parlant du saint pour qui elle éprouve, avec tous ses amis, une grande dévotion.
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